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2e, 4e et 5e jeudis du mois de 10 h à 12 h (Maison de l'Asie, 22 av du Président-Wilson 75116 Paris), du 9 novembre 2017 au 31 mai 2018
Le séminaire 2017-2018 poursuit la réflexion engagée sur la question urbaine en Corée du Nord (République populaire démocratique de Corée, RPDC), en lien avec un programme de recherche financé par PSL (« Pour une approche alternative et engagée des villes nord-coréennes », voir https://www.univ-psl.fr/fr/laureats-appel-projets-lettres-shs-eco-finances-gestion).
Avec une population urbaine estimée à 60%, la RPDC présente en effet des indices de développement contradictoires (une économie industrielle, des taux de natalité faibles et un taux d’alphabétisation élevé, sur fond de crise alimentaire diffuse) que le séminaire a commencé d’aborder en 2016-2017, en interrogeant la ville et ses processus de construction (architecture et urbanisme), qui ont formé – et forment toujours – une des matrices de la construction et de la modernisation de l’État socialiste. Mettant en œuvre une approche pluri-disciplinaire, le séminaire progresse en développant trois grandes problématiques. 1) Comment historiciser la lecture du paysage urbain nord-coréen, au-delà de la construction dictatoriale des 60 dernières années ? 2) Comment mieux articuler les formes urbaines, la morphologie et l’architecture avec les faits sociaux, en dépassant l’analyse des villes nord-coréennes comme des « scènes du régime » ? 3) Comment déverrouiller l’étude des villes nord-coréennes en les situant de manière plus pertinente au sein d’un vaste monde (post)-socialiste dominant en Asie ?
En 2016-2017, le séminaire a particulièrement travaillé la question de la formation récente du paysage urbain, en lien avec le développement de l’État totalitaire nord-coréen. Une collection de comptes rendus d’ouvrages et d’articles sur le sujet a été commencée à partir des lectures en séminaire et des présentations de travaux d’étudiants. Tout en poursuivant la construction de cette collection, le séminaire analysera les matériaux (textes et images) fournis par Chosŏn kŏnch’uk, une revue d’architecture publiée en RPDC depuis les années 1990.
Mots-clés : Anthropologie, Cinéma, Culture, Développement, Développement durable, État et politiques publiques, Géographie, Patrimoine, Paysage, Urbaines (études), Ville,
Aires culturelles : Asie orientale, Corée,
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Géographie
Intitulés généraux :
Renseignements :
par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
sur entretien, après envoi d'un pré-projet (1 page maximum), et d'un CV.
Réception :
sur rendez-vous.
Niveau requis :
L ou équivalent. La pratique du coréen est vivement recommandée mais n'est pas obligatoire.
Site web : http://crc.ehess.fr/
Site web : http://crc.ehess.fr/index.php?170
Adresse(s) électronique(s) de contact : gelezeau(at)ehess.fr
En 2017-2018, mon séminaire s’est trouvé adossé à la première année de lancement d’un projet ANR intitulé « Ville, architecture et urbanisme en Corée du Nord » (CITY-NKOR).
Les premières séances ont été consacrées à discuter la perspective de ce séminaire qui rompt avec les approches dominantes des relations internationales conçues de manière prescriptive et promeut une approche engagée, pluridisciplinaire et trans-historique des villes en Corée du Nord. Confrontant le totalitarisme nord-coréen, tout en le problématisant, l’approche développée critique les perspectives orientalisantes et moralisatrices (rarement remises en cause) qui caractérisent tout discours sur la Corée du Nord. Cette première partie du séminaire a donc discuté la perspective scientifique d’une approche des villes en Corée du Nord, qui remet en cause les savoirs conventionnels concernant les conditions d’une recherche sur la Corée du Nord – par exemple la possibilité d’y faire du terrain.
Dans une deuxième partie, le séminaire a poursuivi la constitution d’une collection de comptes rendus de livres et d’articles, pour travailler trois grandes problématiques. 1) Comment historiciser la lecture du paysage urbain nord-coréen, au-delà de la construction dictatoriale des 60 dernières années et en articulation avec ce que nous savons de l’histoire des villes en Corée du Sud ? 2) Comment mieux articuler les formes urbaines, la morphologie et l’architecture avec les faits sociaux, en dépassant l’analyse des villes nord-coréennes comme des « scènes du régime » ? 3) Comment déverrouiller l’étude des villes nord-coréennes en les situant de manière plus pertinente au sein d’un vaste monde (post-)socialiste dominant en Asie ?
Une troisième partie du séminaire a été consacrée à l’analyse de la ville de Pyongyang dans un film nord-coréen de 2003, Uri-ŭi hyanggi (= Our Fragrance – Notre essence), une romance qui raconte la rencontre de deux familles, à travers le mariage arrangé de Sae Byol (guide touristique pour les étrangers) et Pyong Ho (ingénieur agro-alimentaire). Dans ce film, la problématique de la modernité et de la relation à l’Occident est traitée par le contraste qu’offre la famille de Sae Byol, qui valorise de nouvelles habitudes à l’occidentale (on sert du champagne pour célébrer de joyeux moments, on utilise des mots qui viennent de l’anglais, etc.) et celle de Pyong Ho, fidèle à la tradition « purement coréenne ». Au-delà de cette thématique qui correspond aux canons du cinéma nord-coréen (qui doit être éducatif avant tout), nous avons étudié différents lieux de la ville dans ce film. La présentation performative de certains paysages types de Pyongyang comme ville capitale fait partie des passages obligés du film, comme celui d’une croisière en bateau-mouche sur le fleuve Taedong qui déroule les grands monuments (mémorial de Kumsusan, pont Chongryu, stade du Premier mai, monument aux Idées du juche), dans un enchaînement qui renvoie à la mise en scène de la ville comme spectacle (Voir par exemple Kim Suk-Young, Illusive Utopia, Theatre, Film and Everyday Performance in North Korea, Ann Arbour, University of Michigan Press, 2010, p. 88 ; Benjamin Joinau, « La flèche et le soleil, topo-mythanalyse de Pyongyang », Croisement 2, ville réelle, ville rêvée, 2012, p. 11 ; Robert Winstanley-Chester, « Patriotism begins with a love of courtyard, rescaling charismatic landscape in North Korea », Tiempo devorado : revista de historia actual, n° 2, Corea del Norte : la transicion invisible, 2015, p. 116-138). Mais notre lecture de ce film nous a permis de déceler d’autres niveaux de discours, au-delà de ce qu’impose la dimension propagandiste du cinéma nord-coréen, notamment dans l’articulation entre espace public et espace privé, avec des scènes situées dans les espaces collectifs des résidences d’appartements, faisant la transition entre la maison et les hauts lieux de la capitale mise en scène. Le film nous aussi a permis d’analyser d’autres lieux de sociabilité urbaine, à travers les épisodes d’une compétition de lutte coréenne ou ssirŭm, qui présente un intéressant matériau concernant des espaces de loisirs et de sociabilité, dans leur matérialité mais aussi dans les usages et les comportements sociaux liés.
Publications
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 27 novembre 2017.