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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Démocratie de la place publique : les mouvements de Maïdan

  • Nilüfer Göle, directrice d'études de l'EHESS ( CESPRA )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

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Jeudi de 18 h à 21 h (salle 11, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 9 novembre 2017 au 31 mai 2018. Les séances des 23 novembre, 11 janvier, 15 février, 8, 15 et 22 mars, 5 et 12 avril, 3 et 17 mai sont supprimées. La séance du 24 mai est supprimée

Nous assistons à un nouveau type de contestation dans le monde entier. Du monde arabe aux capitales occidentales, de la Turquie au Brésil en passant par l’Ukraine, mais aussi en France, il y a une vague de mouvements de contestation. Malgré leurs différences, ces mouvements révèlent tous un malaise social face aux problématiques relatives à l’environnement, la crise économique et le pluralisme culturel. Le domaine du politique tend à se limiter à l’échelle nationale et s’avère être dans l’incapacité à répondre à ces questions globales. L’espace public échappe plus facilement aux contraintes des frontières et des collectivités nationales notamment à travers les technologies de communication et les réseaux sociaux. Ces mouvements mettent en avant de nouveaux modes d’agir en public et en circulation globale de nouveaux répertoires d'action. Ces contestations dans la place publique font apparaître un nouveau « sujet » politique appartenant à des aires culturelles différentes qu’il convient d’interroger.

Ces mouvements sont caractérisés par les lieux, les espaces qu’ils occupent, notamment la Place Tahrir, Gezi Park, les indignés, Nuit Debout à République, et Maïdan. Ils mobilisent le registre des émotions, comme la dignité et le respect. Ce sont des mouvements qui célèbrent le pluralisme dans le rassemblement sur la place et ne cherchent pas à surmonter les différences par une supra identité idéologique ou collective. L’absence de porte-paroles et de leaders montre également les traits communs de ces mouvements. Il y a un mode d’agir des individus en public que l’on peut distinguer de l'intentionnalité des actions sociales et collectives. C’est le lien avec le personnel, l’intime, la foi qui donne une force d’expression en public. La place publique est l’interface entre le foyer de l’individu et le pouvoir de l’État. Elle permet aux citoyens de manifester leurs différences, de se rendre visibles les uns aux autres comme l’écrit Hannah Arendt.

Une citoyenneté performative est en cours d’élaboration. Dans la place publique se mettent en scène de nouveaux imaginaires démocratiques par le biais de la performance, de l’art et de l’humour. L’art devient une partie intrinsèque d’une nouvelle culture publique contestataire. Comment ces nouveaux citoyens « du monde ? » mettent-ils en avant des modes d’agir personnel et élargissent le champ du politique vers des expressions visuelles et performatives ? Comment repenser le rapport entre le public et le politique ?

22 février : La séance sera consacrée à la projection du documentaire "Maïdan" de Sergei Loznitsa à 17 h à l'amphithéâtre François-Furet.

Aires culturelles : Transnational/transfrontières,

Suivi et validation pour le master : Hebdomadaire annuel (48 h = 2 x 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Sociologie

Intitulés généraux :

  • Nilüfer Göle- Modernités multiples
  • Renseignements :

    Pour les inscriptions, contacter Nilüfer Göle et mettre en copie son assistante Zeynep Ugur.

    Direction de travaux d'étudiants :

    sur rendez-vous, les jeudis de 14 h à 16 h, bureau 34 au 105 bd Raspail 75006 Paris. Pour prendre rendez-vous, contacter contacter Nilüfer Göle et mettre en copie son assistante Zeynep Ugur.

    Réception :

    sur présentation d'un projet de recherche adressé par courriel.

    Niveau requis :

    niveau requis : master 1.

    Adresse(s) électronique(s) de contact : gole(at)ehess.fr, warda.hadjab(at)ehess.fr, zeynep.ugur(at)ehess.fr

    Compte rendu

    Nous avons mené une réflexion autour de l’apparition des mouvements de la place publique qui exige un nouveau cadre pour penser le politique à l’ère globale. Nommés par les lieux qu’ils occupent et caractérisés par de nouveaux répertoires d’action collective, on peut faire l’hypothèse que ces mouvements font apparaître un nouveau « sujet » politique appartenant à des aires culturelles différentes. L’occupation de la place publique est un trait commun et central pour comprendre l’élaboration de nouveaux imaginaires démocratiques, mis en scène et en circulation par la performance des acteurs, l’expressivité artistique et l’usage de l’humour. Dans notre approche conceptuelle, l’espace public est le lieu d’action, de manifestation, de conflits des normes et d’expression artistique.
    Le mouvement de la place publique signifie une nouvelle esthétique politique. La mode, l’architecture, et l’art visuel comme formes esthétiques sont inséparables de l’avènement du politique. Le séminaire a été introduit par une brève discussion des approches théoriques à partir des ouvrages des auteurs comme J. Habermas, J. Dewey et H. Arendt. Les outils d’analyse et la méthodologie de l’espace public expérimental (EPE) exposés dans l’ouvrage Musulmans au Quotidien (2015) ont permis d’introduire une réflexion sur la centralité des notions d’« événement » et de « controverse » pour penser l’espace public d’une manière agonistique.
    Afin de sortir du nationalisme méthodologique, une démarche transversale a été adoptée pour étudier ces mouvements à l’échelle globale. La méthodologie de l’EPE a été introduite en rapport avec la théorie de l’action et de la méthodologie de l’intervention sociologique d’Alain Touraine. Le projet de recherche en cours PublicDemos a permis d’enrichir les données et les études de cas. L’étude du mouvement Gezi a fourni un exemple pour élaborer une anatomie des mouvements de la place publique. Le film « Maïdan » de Sergei Loznitsa a été utilisé comme une source pour décrire comment l’occupation de la place était retournée en une forme d’habitation collective.
    La réflexion a été accompagnée par les présentations des doctorants et des invités. On peut donner quelques exemples. Le doctorant Iuri Cunha en se basant sur le mouvement du juin 2013 au Brésil a montré comment les centres commerciaux devenaient des espaces de contestation entre différentes classes sociales. L’invité Léopold Lambert, de la revue The Funambulist a décrit la nature du pouvoir par une description sensible de l’atmosphère régnante dans les espaces publics. Henri Herré, l’architecte a présenté la méthode « sociotraces » afin de sensibiliser les étudiants en sociologie à l’aspect visuel dans leur environnement et dans leur recherche. Le travail de la doctorante Parand Danesh sur l’iconographie urbaine sur les martyrs de la guerre Iran-Irak sur les murs de Téhéran a illustré le rôle de l’art visuel dans la fabrication du récit national par le pouvoir.

    Publications

    • « Undesirable Public Intellectuals », Globalizations, 2017, p. 1-7.
    • « Vers une version hybride de l’islamo-populisme ? », Les Cahiers de l’Orient, vol. 3, n° 127, 2017, p. 53-64.
    • « Turkey Is Undergoing a Radical Shift, From Pluralism To Islamic Populism », Huffington Post, 2017.
    • « Le global et la gauche : des convergences sont-elles possibles ? », dans La Gauche Globale. Hier, aujourd’hui, demain, sous la dir. d’I. Wallerstein, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2017, p. 133-146.
    • « Contesting Islam : The Making and Unmaking of Religious Faith », dans Contesting Religious Identities : Transformations, Disseminations and Mediations, sous la dir. de B. Becking, A.-M. Korte et L. van Liere, Brill, Leiden, Boston, 2017, p. 203-2018.

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 24 mai 2018.

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