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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Ce séminaire prolongera la réflexion menée les années précédentes sur les différents modes d’appropriation des objets matériels et des choses (éléments indéfinis, objets naturels, restes humains…), enrichie d’un questionnement sur les mises en scènes et en récits dans différents domaines, comme le rituel et le théâtre, l’écriture et le musée. Nous tenterons de construire des articulations fécondes entre les recherches sur les objets et des choses, qui relèvent tant de l’anthropologie que de l’histoire, de l’archéologie ou de la technologie culturelle et celui du spectacle qui intéresse aussi bien l’anthropologie que les études théâtrales. Une partie de notre questionnement portera sur le partage des tâches entre disciplines et les enjeux épistémologiques actuels. En effet, qu’il soit question de performances rituelles ou spectaculaires, de productions artistiques, de narration muséographique ou de théâtralisation des patrimoines, les objets étudiés correspondent tous à une production discursive dont il convient d’analyser de façon interdisciplinaire la genèse historique et de restituer le processus social de mise en forme.

Nous explorerons les différentes approches des objets et des choses en sciences sociales, en décryptant certaines notions clés (attachement, valeur, échange, chose/objet…) et en nous concentrant sur ce qui est pensable dans un continuum biographique, par la prise en compte d’enjeux sociaux, politiques et symboliques. Les musées et le spectacle nous offriront des passerelles avec une réflexion critique sur la recherche procédant par la création artistique, et notamment par la performance. Par un atelier associé au séminaire, on s’intéressera plus spécialement aux projets artistiques qui puisent dans la boite à outils de l’ethnographie qu’aux projets scientifiques qui assument une dimension artistique, qu’elle soit littéraire, poétique ou relevant des arts plastiques.

8 novembre 2017 : Francine Saillant, « Récit d'un film par accident. Aller et retour du texte à l’image »

Comment penser le rapport à l'image dans une recherche qui n'est pas inscrite dans le format de l'« anthropologie visuelle » ? Que vient faire la caméra dans une ethnographie qui pourrait être classifiée de classique ? C'est l'histoire d'une recherche, celle réalisée autour du mouvement noir à Rio dans les années 2000, qui sera ici relatée. L'histoire de cette recherche sera située non pas dans son déroulement central, mais dans son déroulement parallèle, en marge de l'écriture ethnographique. Il sera question de prise de risque, d'engagement moral, de partage, d'incertitude, de débats sur la signification du travail de recherche anthropologique aujourd'hui et de la nature même de la scène sur laquelle agit et se meut l'anthropologue. Il sera aussi question des débats qui entourent ce que serait une « vraie ethnographie » et un « vrai film ethnographique ». La conférence prendra la forme d'un récit expérientiel situé aux marges de diverses formes de savoir, notamment anthropologique et artistique. Qu'est-ce que la mise en fiction du soi collectif présentée au regard de l'anthropologue apprenant ?

Professeure émérite au  département d’anthropologie de l'université Laval, Francine Saillant a dirigé de nombreux projets de recherche touchant la santé, le droit, l'image, l'épistémologie et le postcolonailisme. Spécialiste des études brésiliennes et québécoises, elle a dirigé la revue Anthropologie et Sociétés et le Centre de recherches Cultures, Arts et Sociétés. Chercheure engagée, elle a amorcé dans les années 2000 un travail de recherche de longue haleine sur le mouvement noir au Brésil et les réparations eu égard à l'esclavage. Auteure du livre Le mouvement noir au Brésil (prix Luc Lacourcière), elle a réalisé, en parallèle de ce travail une série de quatre documentaires, Resistência, sous un format participatif. Cette série de documentaires quadrilingues, inscrits dans le projet de la route de l'esclave de l'unesco,  a circulé sur trois continents. Francine Saillant est aussi auteure et organisatrice d'une trentaine d'ouvrages, elle développe une pratique en arts visuels et en écriture poétique. Enfin, le co-dirige avec Mondher Kilani le dictionnaire d'Anthropologie Anthropen. Elle est consultante indépendante pour l'Unesco.