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Jeudi de 17 h à 19 h 30 (Centre Alexandre-Koyré, 27 rue Damesme 75013 Paris), cf. calendrier des séances ci-dessous
Le thème de la révolution scientifique est une création de l’historiographie et doit beaucoup à Alexandre Koyré, qui met la révolution au singulier. On connaît un usage structurel qu’en fit Thomas Kuhn, et du coup s’en déduisit une conception du développement scientifique dans des termes de ruptures, justifiant pour l’historien de pouvoir ignorer des périodes différentes, donc se spécialiser, puisqu’il n’y aurait pas véritable filiation et l’impossibilité même de postérités. Quasi naturellement des réactions furent opposées à une vision aussi scandée de l’histoire, prenant quelquefois la forme intéressante d’une division de cette histoire entre un point de vue qui serait celui des sciences de la vie et celui provenant des sciences du formel et de la matière. Voire une forme d’européano-centrisme, puisque seule l’Europe aurait connu ces révolutions. L’objectif de ce cours est d’exposer différentes formulations dans différents contextes. Patricia Radelet interviendra dans certaines séances, comme indiqué ci-dessous. Des références bibliographiques seront données par écrit, et quelques documents lus distribués.
Jeudi 12 octobre 2017 : La révolution grecque : la crise des irrationnelles
Paul Tannery a le premier parlé d’un âge d’or de la science grecque, suivi par un déclin. Plus tôt Comte, pouvait considérer l’âge grec pour les mathématiques comme une révolution, mais sans lui attribuer un caractère positif. Dans l’ouvrage de Jean Piaget sur l’épistémologie paru dans la Pléiade, le phénoménologue Jean Toussaint Desanti parlait d’une crise des irrationnelles dont la résolution aurait en quelque sorte permis la fondation euclidienne. Ce sont ces différents récits qu’il s’agit d’abord de comprendre dans leurs attendus, et de confronter.
Jeudi 19 octobre 2017 : La révolution algébrique
L’âge d’or de la science arabe passe par la mise en valeur de l’algèbre d’Al–Khwarizmi en tant que révolution sur ce qui provenait de la science hellène. Un autre récit par Viète refuse une « origine barbare » pour cette algèbre, mais il n’est pas simple de dire si Viète attaque ainsi ses prédécesseurs italiens du XVIe siècle, ou une rupture plus ancienne avec l’ordre grec. La discussion portera sur les jugements des historiens en regard du cas particulier de l’algébrisation de la trigonométrie qui est un peu un trou noir de l’histoire des mathématiques (formules de Viète)
Vendredi 3 novembre 2017 : La révolution galiléenne
Discussion sur l’historiographie prolifique de la révolution galiléenne.
La place de cette révolution dans l’iconographie, notamment en comparaison avec les images issues de Kepler (chute des corps, mouvement des astres, relativité du mouvement).
Liberté des mathématiques et contraintes de la physique : les historiographies de l’affaire Galilée, et le jeu de l’agnotologie ou refus conscient de la connaissance.
Jeudi 23 novembre 2017 : La révolution des quantités et de leur variations
Les calculatores du XIVe siècle ont inventé un moyen de représenter géométriquement des modes de variations des quantités, au point que Pierre Duhem parle de l’invention de la notion de fonction. C’est à l’histoire de cette idée de fonction que cette séance est consacrée, en cherchant les divers protagonistes possibles, Mersenne, Roberval, Fermat, puis Leibniz et Newton. En tenant compte d’un fort courant historiographique qui n’entend évoquer le concept de fonction qu’au XVIIIe siècle.
Patricia Radelet-de Grave fera un exposé portant sur la notion de fonction spécifiquement chez Leibniz et chez Johann Bernoulli
Jeudi 30 novembre 2017 : La révolution des Big Data et le rôle des probabilités
Il ne s’agira pas vraiment de parler du fond scientifique et technique, mais du ressenti d’un changement de civilisation par l’intervention des probabilités dans des procédures de calcul, comme par exemple la recherche des communautés dans un graphe.
Jeudi 7 décembre 2017 : la révolution infinitésimale
Le passage à l’infinitésimal est un des must de l’historiographie, mais elle a suivi des pistes très différentes, jusqu’à l’analyse non standard. Moins que l’explication épistémologique à la Léon Brunschvicg, ou à la façon de Comte, ici il s’agira d’envisager l’infinitésimal comme un récit, car il tend joliment aujourd’hui à devenir romancé.
Jeudi 14 décembre 2017 : La contribution de Fourier en physique mathématique est-elle une révolution ?
On peut penser que Fourier, qui publie la Théorie analytique de la chaleur en 1822, réalise une révolution en juxtaposant dans une même œuvre l’experimental philosophy qui fit les beaux jours de la Royal Society à sa fondation, le cartésianisme analytique en physique, et le sens de la formule mathématique qui fait sens conceptuel issu de d’Alembert. Ce serait en gros le point de vue de Comte. On peut au contraire estimer qu’il réalise une sorte d’achèvement du long terme de la notion de fonction arbitraire (qui joue un tel rôle dans ses démonstrations sur les séries et intégrales éponymes). Quant à Fourier lui-même il estime apporter la même révolution que celle de Newton avec l’attraction universelle.
Jeudi 11 janvier 2017 : La révolution quantique
Patricia Radelet-de Grave interviendra sur le thème de Weyl et l’invention de l’invariance de jauge.
Révolution et continuisme chez von Neumann en 1932 dans les Fondements mathématiques de la mécanique quantique et en particulier postérité de Fourier dans cette mécanique quantique ainsi mathématisée
Jeudi 18 janvier 2018 : La révolution relativiste
Discussion sur l’historiographie également prolifique concernant Einstein, et Patricia Radelet interviendra pour situer Einstein et Poincaré
Jeudi 25 janvier 2018 : La révolution logique
Patricia Radelet-de Grave évoquera la réponse négative apportée par Turing à Hilbert.
La postérité de Turing
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Histoire - Histoire des sciences
Intitulés généraux :
Renseignements :
renseignements généraux : formation.hsts(at)ehess.fr, tél. : 01 40 79 80 01, ou sur le site internet du centre Alexandre-Koyré.
Direction de travaux d'étudiants :
sur rendez-vous, pris auprès de Jean Dhombres, par courriel ou tél. : 01 40 78 26 45
Adresse(s) électronique(s) de contact : jean.dhombres(at)cnrs.fr
Le thème des révolutions scientifiques est une création de l’historiographie et doit beaucoup à Alexandre Koyré, qui la met au singulier. Thomas Kuhn en fit un usage structurel et du coup la conception d’un développement scientifique en des termes de ruptures, justifiant pour l’historien de pouvoir ignorer des périodes différentes, donc de se spécialiser, puisqu’il n’y aurait pas au fond de véritables filiations, et l’impossibilité même des postérités. Cet enfermement correspond à une professionnalisation de l’histoire des sciences, et à son éloignement même de la science. On a ainsi oublié les efforts de Tannery pour évoquer un déclin de la science grecque au sein même de l’époque dite brillante, les descriptions d’une science carolingienne, ou d’une renaissance du XIIe siècle, sans parler des efforts sur la science chinoise au temps des Song et des Yuan, et du déclin ultérieur. Quasi naturellement des réactions furent opposées à une vision aussi scandée de l’histoire, prenant parfois la forme d’une division de cette histoire entre un point de vue qui serait celui des sciences de la vie en continuité parfaite et celui provenant des sciences du formel et de la matière, en permanente refonte. En un séminaire hebdomadaire au premier semestre, l’objectif a été d’exposer différentes formulations de l’historiographie en les confrontant à des contextes précis, en se débarrassant des « lois de l’histoire » ou des « paradigmes », pour distinguer des régimes de scientificité, lesquels tiennent à des dynamiques culturelles, sociales et économiques, qu’ils peuvent aussi bien influencer. Ce qui est une tentative de retrouver au sein de l’histoire la force de l’épistémologie historique. On est parti de la révolution grecque et de ce qui s’appelle la crise des irrationnelles, puis envisagé successivement la révolution algébrique, la révolution des quantités et de leurs variations, la révolution galiléenne, la révolution du physico-mathématique, la révolution infinitésimale, la révolution quantique vue par le mathématicien von Neumann, jusqu’à la révolution des Big Data.
Publications
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 23 janvier 2018.