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Ingénieurs, professions techniques et sociétés. « Les sciences de l’ingénieur »

Ouvert à la circulation PSLExtend

S'il s'agit de l'enseignement principal d'un enseignant, le nom de celui-ci est indiqué en gras.

3e jeudi du mois de 15 h à 17 h (salle des artistes, 96 bd Raspail 75006 Paris), du 16 novembre 2017 au 17 mai 2018

Le cycle sur l’évolution historique des « sciences de l’ingénieur » se poursuivra cette année, dans l’esprit d’analyse des conceptions développées à différentes périodes historiques, mais aussi selon différentes aires culturelles, tel qu’il a été proposé en 2016-2017. À partir du XVIIIe siècle, les publications se multiplient, voulant décrire dans différents domaines techniques, les savoirs spécifiques à l’ingénieur. Ces « sciences » nouvelles se fondent largement sur les réalisations dues à ces experts qui leur assurent une légitimité professionnelle et définissent leur champ d’action. Elles s’inscrivent aussi dans des établissements spécialisés dans lesquels elles sont progressivement enseignées.  Depuis cette période, les sciences de l’ingénieur n'ont cessé de se déployer tout en se redéfinissant en permanence, intégrant les transformations scientifiques et techniques, et se confrontant également aux évolutions des demandes sociales. Le séminaire se propose d'examiner ces transformations depuis le XVIIIe siècle jusqu'à nos jours et d'interroger la pertinence actuelle de cette notion.

Suivi et validation pour le master : Ouvert sans validation d'ECTS

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Histoire - Histoire des techniques

Intitulés généraux :

  • Claudine Fontanon- Histoire des sciences appliquées, XVIIIe-XXe siècle
  • André Grelon- Sociologie des professions techniques
  • Adresse(s) électronique(s) de contact : andre.grelon(at)ehess.fr, andre.grelon(at)ens.fr, claudine.fontanon(at)ehess.fr, irina.gouzevitch(at)ens.fr

    Compte rendu

    Le cycle sur l’évolution historique des sciences de l’ingénieur s’est poursuivi cette année, dans l’esprit d’analyse des conceptions développées à différentes périodes historiques, mais aussi selon différentes aires culturelles, tel qu’il a été proposé en 2016-2017. Depuis le XVIe siècle, les sciences de l’ingénieur n’ont cessé de se déployer tout en se redéfinissant en permanence, intégrant les transformations scientifiques et techniques, et se confrontant également aux évolutions des demandes sociales. Le séminaire a proposé d’examiner ces transformations et d’interroger la pertinence actuelle de cette notion.
    Aleksej Krajkovskij, professeur à l’École supérieure de l’Économie, Saint-Pétersbourg, a proposé d’étudier le transfert des technologies européennes de construction de navires vers la Russie au XVIIIe siècle et notamment les projets du gouvernement pour la modernisation des transports et des bateaux du nord du bassin de la Volga. L’auteur a étudié l’organisation des structures de transfert avec un navire aussi bien que les instruments de circulation des connaissances (dessins techniques ou modèles réduits).
    Irina Gouzévitch (EHESS/Centre Maurice Halbwachs) a exposé les résultats d’une recherche qui restitue l’histoire de la première machine à vapeur à double effet ayant fait, en 1795, un voyage de l’Angleterre à La Havane pour être utilisée dans l’industrie sucrière cubaine, sur l’initiative et aux frais des riches planteurs de cette colonie espagnole ultramarine. N’ayant fonctionné que quelques mois, la machine a été abandonnée et son sort est longtemps demeuré inconnu. Le renouveau de l’intérêt pour cette invention est lié à la découverte d’un portrait cubain de la fin du XVIIIe siècle. Une recherche approfondie à la fois documentaire et analytique a été effectuée en France, en Angleterre, en Espagne et enfin, à Cuba. Ladite recherche a permis d’identifier les acteurs principaux de cette aventure transocéanique et de comprendre leurs motivations. Pour comprendre la nature de cette invention – qui s’est avérée parfaitement innovante même par rapport à la grande réalisation de James Watt –, elle a réalisé une plongée dans l’histoire des techniques de la vapeur du dernier XVIIIe siècle et des recherches théoriques émergentes sur les propriétés de la vapeur.
    Poursuivant l’analyse de cette question, Maxime Gouzévitch, chargé de recherche à l’Institut de Physique Nucléaire de Lyon (IPNL), s’est attaché à restituer l’histoire inconnue d’une célèbre loi sur l’équilibre liquide-vapeur de Clapeyron-Clausius. Le dernier quart du XVIIIe siècle a marqué un grand tournant de la révolution industrielle. Cette période cruciale a connu la naissance d’un moteur universel qu’était la machine à vapeur à double effet. Le développement des machines à vapeur jusqu’à la fin du xviiie siècle était essentiellement empirique. Or, à partir d’une certaine étape, leur amélioration commençait à exiger une connaissance scientifique des propriétés de l’agent moteur. James Watt et Augustin Betancourt sont tous deux arrivés à cette conclusion, l’un travaillant sur les machines à vapeur à double effet et l’autre sur les pompes à vapeur. Cependant les recherches de l’inventeur britannique n’ont servi qu’à l’amélioration de son outil dont il tirait un revenu personnel considérable. A contrario, ceux de Betancourt ont rapidement dépassé les limites de l’application pure pour se projeter vers la théorie générale des machines à vapeur. L’objectif de cette communication est de présenter un Mémoire, curieux et peu connu dans l’œuvre de Betancourt, sur la force expansive de la vapeur d’eau et de montrer comment au gré des circonstances historiques une expérience scientifique de Betancourt au parfum d’espionnage a évolué, à travers deux générations de scientifiques aussi connus que Prony, Sadi Carnot, Clapeyron etc., dans une loi fondamentale de la nature. En particulier, il a examiné comment le terreau fertile des Grandes écoles alors en formation a permis de mettre en place cette filiation.
    Loïc Petitgirard et Camille Paloque-Bergès (Laboratoire HT2S/CNAM) ont présenté leurs recherches sur les ingénieurs informaticiens du « centre de calcul » du CNAM (1968-1988). L’informatique, jeune domaine au sens scientifique et industriel, acquiert une légitimation scientifique et professionnelle au fil des années 1960 et 1970 (en particulier dans le domaine des systèmes informatiques ainsi que des applications pour la gestion des entreprises). Dans ces grandes transformations, les ingénieurs informaticiens ont été amenés à jouer un rôle important, à l’image des grands corps d’ingénieurs de la modernité industrielle. Les intervenants se sont intéressés au cas des ingénieurs informaticiens en activité dans des « centres de calcul » de l’enseignement supérieur, en particulier dans celui du Cnam des années 1970 jusqu’à la création, dans cet établissement, d’un laboratoire de recherche dédié à l’informatique (le CEDRIC) en 1988. Dans ce contexte, ils ont montré comment ces ingénieurs, au cours des décennies 1970 et 1980, ont participé à l’équipement français des structures d’enseignement et de recherche dans le public, en composant avec la politique préférentielle française héritée du Plan Calcul et comment ils ont structuré une culture professionnelle de l’informatique à travers leur implication dans des associations d’utilisateurs de machines mais aussi des projets de recherche à l’intersection des travaux académiques et industriels.
    Brice Cossart (Institut universitaire européen de Florence) s’est intéressé aux artilleurs et à la construction de la monarchie hispanique (1560-1610). Ce chercheur a proposé d’explorer le triptyque guerre-savoirs-état à travers l’étude d’une profession technique méconnue : les artilleurs. Au sein des structures militaires émergentes de la Monarchie hispanique du XVIe siècle, ces individus constituaient un vaste groupe socioprofessionnel dont la tâche était d’utiliser les pièces d’artillerie. Or, ces humbles techniciens furent au cœur de l’apparition d’une discipline originale qui proposa d’appliquer l’arithmétique, la géométrie et la philosophie naturelle aristotélicienne au contrôle du tir au canon. L’auteur s’est attaché à reconstruire le contexte social, politique, technique et culturel dans lequel s’insérèrent les traités de Tartaglia (Nova Scientia, 1537, Quesiti et inventioni diverse, 1546), de Collado (Platica manual de artillería, 1592) ou encore d’Ufano (Tratado de artillería, 1612). Il sera notamment démontré que la publication de ces livres techniques fut intimement liée à l’émergence d’institutions d’enseignement appelées « écoles d’artilleurs », que la Monarchie hispanique mit en place à partir des années 1560 afin de faire face à l’explosion de ses besoins en techniciens capables d’utiliser les canons.

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 25 juillet 2017.

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