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Mardi de 10 h à 12 h (salle 12, 105 bd Raspail 75006 Paris), les 7 et 14 novembre, 5, 12, 19 décembre 2017, 9, 16, 23, 30 janvier, 6, 13, 20, 27 février, 6, 20, 27 mars, 10 avril, 22 et 29 mai, 5, 12, 19 juin 2018. Les séances des 10 avril, 5, 12 et 19 juin se dérouleront de 10 h à 13 h. La séance du 10 avril est annulée
De très nombreux récits de voyage et histoires de colonie ont été rédigés à propos des îles anglaises et françaises de la Caraïbe du début du XVIIe au milieu du XIXe siècle. Les historiens actuels des sociétés coloniales et esclavagistes des Antilles s’en servent comme sources d’information sans toujours réfléchir aux problèmes épistémologiques que pose un tel usage. Aussi le séminaire ré-ouvrira-t-il ce corpus dans une perspective critique et comparative. Les œuvres de Richard Ligon et de Jean-Baptiste Du Tertre sur la Barbade et les Îles du Vent ou encore d’Edward Long et de Médéric Louis Élie Moreau de Saint-Méry sur la Jamaïque et Saint-Domingue seront, par exemple, analysées et confrontées.
Mardi 22 mai 2018 : William Max Nelson (maître de conférences à l'Université de Toronto, invité à l'EHESS), « The Circulation of Ideas of Race in the Atlantic World »
This seminar will analyze the development of ideas of race and their movement around the Atlantic world in the second half of the eighteenth century. We will particularly investigate the ways that certain ideas spread around the Atlantic in books without a clear sense of their origins, due to the great amount of unattributed quotation and paraphrasing that occurred in the eighteenth century, given the very different norms of authorial attribution. Focusing on a few specific ideas of the French naturalist Buffon, we will see how they spread in the Anglophone Atlantic without acknowledgement of their roots through the books of best selling authors such as Oliver Goldsmith.
Mardi 29 mai 2018 : William Max Nelson (maître de conférences à l'Université de Toronto, invité à l'EHESS), « The Enlightenment Origins of Organicism »
This seminar will discuss the history of ideas of organicism in the Enlightenment. This is a relatively overlooked aspect of Enlightenment thought that presents quite a different picture from the traditional story of the Enlightenment as an Age of Reason characterized by calculative, mechanical rationality. The seminar will cover the origins of the idea of the organism in Enlightenment scientific theories of “organization” and “organized bodies.” It will then show how these scientific ideas were translated into social and political thought.
Mots-clés : Coloniales (études), Comparatisme, Empire, Esclavage, Histoire,
Aires culturelles : Amériques,
Suivi et validation pour le master : Hebdomadaire annuel (48 h = 2 x 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Histoire - Histoire et civilisations des Amériques
Intitulés généraux :
Renseignements :
par courriel
Direction de travaux d'étudiants :
sur rendez-vous
Réception :
sur rendez-vous
Niveau requis :
licence
Site web : http://cena.ehess.fr/
Adresse(s) électronique(s) de contact : cecile.vidal(at)ehess.fr
La plus grande partie du séminaire a consisté à lire en parallèle et à commenter Edward Long, The History of Jamaica (London, 1774) et Médéric Louis-Élie Moreau de Saint-Méry, Description topographique, physique, civile, politique et historique de la partie française de l’isle de Saint-Domingue (Philadelphie, Paris et Hambourg, 1797-1798). Le second ouvrage a été publié plus tardivement que le premier, mais il a été rédigé dans les années précédant la Révolution française. Les deux livres constituent des sources fondamentales pour les historiens de la Jamaïque et de Saint-Domingue, les deux colonies les plus riches des Amériques dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Ils sont cependant rarement lus et étudiés dans leur intégralité, la plupart des lecteurs se focalisant sur les parties relatives aux théories ou conceptions raciales de leurs auteurs : Long est surtout connu pour ses thèses polygénistes, minoritaires au XVIIIe siècle, et Moreau de Saint-Méry pour son tableau des taxinomies raciales. Pourtant, l’ouvrage de Long constitue aussi une défense du système esclavagiste en réponse à l’essor de l’abolitionnisme, un plaidoyer en faveur de l’autonomie des colonies face à la métropole, ainsi qu’un plan de réformes pour augmenter la croissance jamaïcaine et rattraper Saint-Domingue. Quant au livre de Moreau de Saint-Méry, il offre un panégyrique de la perle des Antilles à travers le descriptif des pérégrinations de l’auteur dans tous les quartiers de la colonie. Parce qu’il retrace la mise en valeur progressive de la partie française de l’île, ce récit de voyage peut être interprété comme une nouvelle prise de possession. Au moment de sa publication, le monde qu’il décrit a cependant disparu, emporté par les troubles de la période révolutionnaire. Aussi l’auteur, alors réfugié aux États-Unis, appelle-t-il de ses vœux la restauration de ce qu’il considère être la splendeur d’antan de Saint-Domingue.
Les deux ouvrages sont également rarement lus ensemble bien que la comparaison permette de mieux comprendre les singularités de chacun, tout en mettant en évidence de nombreuses convergences. Comme son titre l’indique, l’ouvrage de Long donne une part plus grande à l’histoire de l’île, la description topographique n’occupant qu’une place restreinte, tandis que c’est l’inverse chez Moreau de Saint-Méry. Ayant dirigé la plantation familiale avant de rentrer en métropole, Long accorde aussi une plus grande importance à l’univers des plantations, tandis que l’avocat français consacre de larges sections de son livre aux villes et notamment à Cap-Français. Moreau de Saint-Méry en reste à une vision caricaturale de la société domingoise réduite à la tripartition blancs, libres de couleur et esclaves, tout en dissertant sur la créolité des colons nés en Amérique, là où Long est attentif à la hiérarchie sociale et à la diversité ethnique parmi les blancs. Il fait d’ailleurs preuve d’un antisémitisme virulent. Si les deux auteurs gardent leur loyauté envers la métropole, ils ont en partage le patriotisme qu’ils éprouvent à l’égard de leur île d’adoption, ainsi qu’une vision racialisée de la société coloniale. Bien que l’un soit polygéniste et l’autre monogéniste, les régimes raciaux qu’ils soutiennent ne sont pas si différents. Long condamne le métissage alors que Moreau de Saint-Méry insiste davantage sur sa prévalence. Ce dernier est toutefois habité par la crainte de ne pouvoir reconnaître les origines d’un individu en fonction de son phénotype, cherche à rétablir de multiples barrières raciales et considère que, quelle que soit leur proportion de « parties blanches » ou « noires », les « sang-mêlés » ne pourront jamais devenir blancs ou noirs. De son côté, Long soutient l’obtention par les libres de couleur de droits différenciés en fonction de leur lieu de naissance et de leur degré de métissage. Il envisage également d’utiliser des esclaves « mulâtres » pour mettre en valeur les parties inoccupées de l’île, puis de les affranchir afin d’en faire des colons-miliciens. Long comme Moreau de Saint-Méry considère les « mulâtres » comme le « meilleur mélange ». Le système tri-racial qu’ils prônent tous deux, en dépit de leurs divergences intellectuelles sur l’unicité ou la diversité humaine, n’est donc pas moins informé par la pensée raciale que l’ordre biracial de l’Amérique du Nord britannique opposant blancs et noirs, même s’il accorde une place intermédiaire aux libres de couleur. La confrontation entre ces deux ouvrages permet ainsi d’éclairer différemment l’articulation entre une histoire intellectuelle et une histoire sociopolitique de la race.
Publications
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 10 avril 2018.