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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Puissance territoriale et pouvoir royal dans la modernité politique

  • Pierre Bonin, professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ( Hors EHESS )
  • Fanny Cosandey, directrice d'études de l'EHESS ( CRH )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

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1er, 3e, et 5e jeudis du mois de 17 h à 19 h (salle 3, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 16 novembre 2017 au 31 mai 2018. Pas de séance les 30 novembre 2017 et 1er mars 2018. La séance du 3 mai se déroulera en salle A08_51 (54 bd Raspail 75006 Paris)

Dans le prolongement de l’année précédente, le séminaire s’interrogera sur les ressorts de la modernité politique en examinant la construction monarchique dans son rapport au territoire. La force tirée d’une assise domaniale engage un double mouvement à bien des égards contradictoire, entre une dynamique féodale dans laquelle s’inscrit une royauté soucieuse d’affirmer sa puissance sur la terre et sur les hommes, et une théorie politique qui puise sa force dans l’émancipation des liens personnels. À une histoire longue faite d’affaiblissement et de reconquête de l’autorité répond celle d’un progressif accroissement patrimonial des Capétiens qui contribue à légitimer de nouveaux modes de gouvernement. Loin d’être linéaire, le « travail de la monarchie sur elle-même » (Denis Richet) résulte d’emprunts multiples à des régimes concurrents. Dépassant le modèle impérial, l’affirmation d’un contrôle exclusif se fait au prix d’une réduction des ambitions à un territoire limité tandis que, dans un même mouvement, le passage de la saisine coutumière à la pleine propriété d’inspiration romanisante engage une autre façon de penser les biens privés. Ainsi, l’héritage médiéval de ce qui est appelé au XVIIe siècle « féodalité » continue longtemps de structurer, d’influencer, voire de contraindre les formes et les pratiques de la société politique. Principalement centrée sur la période des XVIe-XVIIIe siècles, dans un dialogue constant entre historiens et juristes, l’analyse ne se privera pas d’ouvrir vers d’autres champs de la recherche.

Aires culturelles : Europe, France,

Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Histoire - Histoire et civilisations de l'Europe

Intitulés généraux :

  • Fanny Cosandey- Patrimoine et souveraineté. Anthropologie du Régime monarchique
  • Direction de travaux d'étudiants :

    sur rendez-vous.

    Réception :

    sur rendez-vous demandé par courriel : Pierre Bonin, Fanny Cosandey

    Niveau requis :

    master, doctorant, chercheur.

    Adresse(s) électronique(s) de contact : pljb(at)free.fr, cosandey(at)ehess.fr

    Compte rendu

    Le séminaire de cette année consistait à interroger la construction monarchique dans son rapport au territoire. Partant du double mouvement qu’engage l’assise domaniale, entre dynamique féodale liée à la domination sur les hommes et sur la terre, et élaboration doctrinale à partir de l’engagement public de ce bien patrimonial, les contributions ont scruté les emprunts multiples de ces deux régimes concurrents afin d’explorer les voies de la modernité politique. Les premières séances, consacrées à l’historiographie, ont montré comment la thématique de l’élaboration domaniale par accroissement du patrimoine capétien (alliances, transmissions, conquêtes) se heurtait à l’idée, développée sous l’Ancien Régime et reprise par la suite, d’un retour de l’autorité après usurpation par les grands féodaux du domaine initial. Observée également sous l’angle des manuels de droit, cette question révèle toute l’ambiguïté d’un pouvoir royal légitime par essence et construit sur la base d’un élargissement territorial. Partant de là, deux principaux dossiers ont été abordés : d’une part, le territoire comme fondement de la nation et, d’autre part, le domaine en tant qu’il est constitutif d’une forme de pouvoir. Prenant pour cadre la Normandie des Xe-XIe siècles, G. Davy a proposé, en se fondant sur la chronique dite de saint Quentin, une lecture de la souveraineté qui souligne la relation entre l’unité territoriale, l’émergence de la nation et la constitution d’un royaume, tandis qu’A. Pokecs Kovac décrivait un royaume de Hongrie dont l’indépendance devait tenir compte des autres possessions Habsbourg dans l’Empire et de la co-présence des deux couronnes. C’est alors le problème de l’État au regard de son territoire qui est en jeu, et dont D. Soldini a retracé les débats dans une Italie du XIXe siècle partagée entre unité et fédéralisme. Cette dimension théorique trouvait des prolongements dans l’examen du monopole de l’interprétation légitime des lois par le souverain (B. Frydman). Dans le second dossier, il s’agissait de revenir sur les corrélations entre domaine et seigneurie, tant du point de vue de la noblesse que de celui de la monarchie. Ainsi, les papiers de famille qui conservent les titres féodaux sont partie prenante de l’identité lignagère et leur mode de classement conserve jusqu’aux traces de la transmission des biens (E. Haddad), faisant de la féodalité un marqueur fort de la structuration du second ordre. Dans le cadre hispanique des Zuniga y Sotomayor, la politique patrimoniale du majorat, qui concerne des domaines inégaux et dispersés sur un vaste territoire, joue davantage sur le patronage des églises et monastères, ce qui est une autre manière de maintenir son autorité sur les terres (A. Roullet). C’est toute la problématique de l’identification des patrimoines et de leur conservation qui est abordée dans ces travaux sur la moyenne et haute noblesse, et jusque dans la famille royale, toujours partagée entre une perspective dynastique et les devoirs d’État, comme le révèle la circulation des biens dans la seconde maison des Bourbons Vendôme (G. Denizot) opposée à la conception monarchique de terres dévolues à l’entretien du royaume tout entier. La théorie politique forgée dès la fin du XVIe siècle interroge sans cesse la dialectique entre public et privé, couronne et particuliers, à partir d’une réflexion sur le domaine qui prend en charge les droits domaniaux des rois de France sur leurs territoires patrimoniaux. À bien des égards, l’affaire est tranchée avec la nationalisation des biens en 1789, qualifiée de « révolution dans la Révolution » (G. Bigot), qui met ce faisant en pratique une nouvelle conception de la propriété.

    Publication

    • « La cour de France sous les Valois », (en chinois) dans Sinologie Française, vol. 17, “Pouvoir/Divination”, sous la dir. de L. Gabbiani et Z. Wei, École française d’Extrême Orient, Pékin, 2017, p. 51-69.

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 2 mai 2018.

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