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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Réceptions croisées des conceptions autochtones et occidentales : ontologies, genre et citoyennetés

  • Catherine Alès, directrice de recherche au CNRS (TH) ( CéSor )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

  • Pascale Molinier, professeur à l'Université Paris-Sorbonne (TH) ( Hors EHESS )

S'il s'agit de l'enseignement principal d'un enseignant, le nom de celui-ci est indiqué en gras.

2e et 4e jeudis du mois de 9 h à 11 h (salle 2, 105 bd Raspail 75006 Paris), première séance exceptionnellement le 16 novembre 2017 puis du 14 décembre 2017 au 14 juin 2018. La séance du 12 avril est annulée

Ce séminaire introduira à une réflexion sur la comparaison des conceptions ontologiques autochtones et les philosophies politiques et morales occidentales du care (Baier, Nussbaum, Tronto, Plumwood, entre autres). L'un des objectifs du séminaire est d'étudier la manière dont les autochtones, hommes et femmes, renouvellent la manière de faire de la politique et amènent, par exemple, à s'interroger sur les conceptions occidentales du care et du féminisme par leur critique de la pensée hégémonique et universalisante occidentale. En effet, des notions telles que celle de nature, féminisme, genre, participation politique, leaders, pour en citer quelques-unes créent des ambigüités, des blocages, voire des impossibilité de comprendre des mondes différents et d'intégrer les différence qui opèrent dans la constitution des nouvelles formes de citoyennetés. La pensée écologique est, pour ainsi dire, révolutionnaire en Occident, et représente un véritable levier critique contre les traditions rationalistes. Mais cette définition devient bien moins originale dès lors qu’elle est mise en regard des systèmes de pensées autochtones, comme ceux des amérindiens par exemple, avec lesquels elle présente certaines similitudes. Or, ces résonnances sont peu traitées par les théoriciennes occidentales du care, soit parce que souvent elles les méconnaissent, ou bien peut-être, parce que certains aspects de la pensée féminine amérindienne représentent une menace et un désaveu pour le féminisme occidental et son « universalisme ».

On se penchera ainsi sur les réceptions du féminisme par les représentant-e-s et intellectuel-le-s autochtones et les nouvelles formes de citoyenneté, les recompositions, les inventions, auxquelles ces inter-interrogations donnent naissance. Le séminaire présentera des travaux récents sur ces thèmes, à la fois théoriques et issus d'enquête de terrain, tels que les discours de femmes intellectuelles autochtones sur le féminisme, le mouvement dé-colonial en Amérique latine, les pratiques de production liées à l’environnement, ou l'utilisation de la pensée chamanique dans la sphère publique.

8 mars : Astrid Ulloa (Université Nationale de Bogota) «  Femmes autochtones, féminismes, genres et participation politique en Amérique latine »

Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Renseignements :

par courriel.

Direction de travaux d'étudiants :

sur rendez-vous uniquement.

Réception :

sur rendez-vous uniquement.

Adresse(s) électronique(s) de contact : ales(at)ehess.fr, pascalemolinier(at)gmail.com

Compte rendu

Le thème que nous avons souhaité développer dans le séminaire porte sur une question d’actualité : l’interaction entre des idées occidentales et celles des autres mondes. Avec la mondialisation, les idées circulent et sont confrontées avec celles en vigueur localement. Ainsi, l’attention à autrui, l’écologie, le féminisme, la citoyenneté ou le développement, notions qui sont toutes des conceptions occidentales, sont l’objet de réception variée auprès des sociétés du Sud. Inversement, les pensées autochtones questionnent la pensée occidentale. Ces conceptions rencontrées se révèlent, en général, dans les mobilisations sociales, les nouveaux leaderships et les pratiques sociopolitiques. Afin d’entamer la comparaison des notions autochtones et occidentales de genre, nature, bien-être et citoyenneté, nous avons, durant l’année 2017-2018, approché les idées occidentales provenant de théories critiques, décoloniales et féministes, ainsi que les théories autochtones des populations avec lesquelles nous travaillons. Nous nous sommes intéressés aux philosophies politiques et morales occidentales du care avec des auteurs tels que Baier, Nussbaum, Tronto, Plumwood, entre autres. Nous avons souligné que la notion de care, qui désigne à la fois une attitude morale et un ensemble de pratiques destinées à prendre soin des autres et de l’environnement, a fait l’objet de nombreux travaux depuis la parution en 1982 de l’ouvrage de Carol Gilligan, In a different voice (voir aussi Garrau & Legoff, 2012), et le lien entre la philosophie du care et les mobilisations publiques (Pascale Molinier ; Sandra Laugier). Les « féminismes autochtones » ont fait spécialement l’objet de notre attention, en particulier, le « féminisme communautaire » formalisé par des dirigeantes amérindiennes au Guatémala (Jules Falquet), ainsi que les débats des autochtones d’Amérique latine sur le féminisme occidental. Ces différentes cultures sont toutes confrontées à l’application de nos idées occidentales sur la nature, le féminisme et le genre, par exemple, qui ne sont pas des notions propres aux sociétés indigènes ou traditionnelles. Il y a néanmoins des discussions sur le féminisme et le genre qui se sont ouvertes lors des forums des mouvements indigènes et paysans et, en particulier, du mouvement des femmes indigènes, qui participent aujourd’hui activement à l’arène publique et au débat politique, et qui ont permis de rendre manifestes les relations d’inégalités de genre dans et entre les peuples autochtones. Différents féminismes, entre autres, les féminismes communautaires et les féminismes décoloniaux, permettent de repenser les relations d’inégalités entre hommes et femmes et positionner les propositions de complémentarité depuis d’autres ontologies et épistémologies (Astrid Ulloa). Si, dans les luttes féministes, la notion de complémentarité apparaît ainsi permettre de corroborer l’égalité des sexes, l’étude de la construction du genre dans des sociétés traditionnelles peut également nous aider à comprendre le processus de hiérarchisation dont la complémentarité des sexes est l’enjeu. La disjonction dualiste apparaît alors comme une des formes du travail symbolique de distinction des sexes qui constitue le clivage préalable indispensable à l’établissement de leur valence différentielle hiérarchique (Catherine Alès). Plusieurs courants féminismes occidentaux aux États-Unis et en Europe ont également été abordés, notamment celui des sorcières avec la féministe Starhalk qui revendique la sorcellerie néo-païenne et appuie les mouvements de revendication des droits autochtones (Camille Dussolier), et les débats internes à l’écoféminisme qui montrent l’écueil de l’essentialisme et de l’appropriation culturelle (Bénédicte Gattere ; Émilie Hache ; Pascale Molinier).

Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 12 avril 2018.

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