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Mardi de 11 h à 13 h (salle 1, 105 bd Raspail 75006 Paris), les 31 octobre, 14 novembre; 5 et 19 décembre 2017, 16 et 30 janvier, 13 et 27 février, 13 mars, 3 avril, 15 mai et 5 juin 2018. La séance du 30 janvier se déroulera de 13 h à 15 h en salle 6 (105 bd Raspail 75006 Paris)
Arpenter un territoire, mesurer le rendement d’un champ, peser des métaux, échanger des pièces de tissus contre des sacs de blés, dénombrer des habitants, établir un indice des prix : toutes ces actions engagent des pratiques de mesure qui sont rarement interrogées en tant que tel. Ce séminaire considère au contraire que l’étude des mesures peut relever d’un questionnaire transversal aux sciences sociales. En référence aux travaux pionniers de Witold Kula, qui fondait la métrologie historique comme un domaine propre et non pas une méthode de l’histoire, le séminaire s’intéressera à la diversité des pratiques de mesure, prêtera attention aux logiques des systèmes dont elles relèvent, à la manière dont elles combinent qualité et quantité, aux effets de la standardisation, et aux modes de représentation associés. Le choix d’une perspective comparative et élargie permettra de s’interroger sur les rapports qui existent entre la mesure des choses et leur commensurabilité et les pratiques quantitatives – statistique, comptabilité, etc. Croisant des espaces et périodes variés au bénéfice de terrains nouveaux, l’objectif du séminaire est aussi de mettre en valeur l’apport d’une anthropologie des mesures pour traiter des questions contemporaines sur la quantification des sociétés et de leurs économies.
31 octobre : Introduction. Présentation de la problématique, des méthodes et pistes de réflexion envisagées
14 novembre : Wiltold Kula et la métrologie historique
5 décembre : Mesurer la population (Morgane Labbé), Mesurer le grain (Grégory Chambon)
19 décembre : Distribution des terres d'église, répartition des charges cléricales et mesures des rendements et des taxes en Ethiopie chrétienne au XIXe siècle, d'après les observations de terrain d'Arnauld d'Abbadie
16 janvier : Mesures du bois et « jeu de l’échange » : les transactions forestières dans la Pologne du XIXe siècle
30 janvier : La mesure du temps dans les souscriptions des manuscrits byzantins
13 février : Construire une enquête globale sur les ouvriers de l'industrie textile
27 février : La « comptabilité carbone » des gaz à effet de serre
La mesure pour s’imposer : l’entrée des scientifiques dans les fournils (1860-1914)
13 mars : Le robinet libre : mesurer sans compteur dans les abonnements à l'eau au XIXe siècle
3 avril : Quantifier les qualités. Approches de la mesure en sociologie
L’ethnographie des mesures corporelles chez les Indiens du Mexique
15 mai : L'industrie, un moyen de financer l'activité agricole ? La comptabilité de la sucrerie de Berneuil (1862-1914)
5 juin : La poignée, la cuillerée et la pincée : la mesure en médecine et en cuisine
Mots-clés : Anthropologie, Archéologie, Culture matérielle, Droit, normes et société, Geste technique, Histoire des sciences et des techniques, Histoire économique et sociale, Savoirs,
Aires culturelles : Asie, Contemporain (anthropologie du, monde), Europe, Méditerranéens (mondes), Transnational/transfrontières,
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Anthropologie historique
Intitulés généraux :
Renseignements :
par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
oui.
Réception :
sur rendez-vous.
Niveau requis :
pas de niveau requis.
Adresse(s) électronique(s) de contact : gregory.chambon(at)ehess.fr, morgane.labbe(at)ehess.fr
Les pratiques de mesure sont décelables dans un vaste champ des activités humaines : arpenter un territoire, mesurer le rendement d’un champ, peser des métaux, échanger des pièces de tissus contre des sacs de blé, dénombrer des habitants, établir un indice des prix etc. La plupart du temps, ces pratiques de mesures sont interrogées selon un point de vue contemporain, influencé par le fonctionnement du système fondé sur le mètre, qui cherche à apprécier le degré de précision, les aspects arithmétiques ou les niveaux de technicité mis en œuvre.
Nous avons au contraire considéré que l’étude des mesures relevait d’un questionnaire transversal aux sciences sociales, en référence aux travaux pionniers de Witold Kula, qui fondait la métrologie historique comme un domaine propre et non pas une méthode de l’histoire. Dès lors, il nous a paru essentiel de s’intéresser aux pratiques de mesure dans leurs multiples dimensions, dans leur matérialité (techniques d’étalonnage, prises de mesures, écrits administratifs…) et en référence aux logiques des systèmes économiques mais aussi sociaux et culturels dont elles relèvent.
Notre attention s’est donc déplacée du fonctionnement des systèmes de mesures en eux-mêmes et de leur simple conversion en système moderne, à la manière dont les pratiques associées combinent qualité et quantité, aux effets de la standardisation, et aux modes de représentation associés dans des contextes précis. Le choix a alors été de suivre une perspective comparative et interdisciplinaire, en s’appuyant sur les interventions de collègues (EHESS et CNRS) qui croisaient des espaces et des périodes variées, et nous présentaient des terrains nouveaux ou en cours d’étude. En s’interrogeant ainsi sur les rapports qui existent entre la mesure des choses, leur commensurabilité et leur contexte social, nous avons, à travers des discussions riches avec les collègues et les étudiants, décelé des domaines où s’expriment plus particulièrement les enjeux de l’élaboration, de la standardisation et de l’usage des poids et mesures : les pratiques comptables, la statistique du recensement, la production agro-alimentaire, les processus industriels, les échanges économiques ou encore des rituels faisant appel aux dimensions anthropomorphiques. En particulier, nous avons pu mettre en lumière tout un réseau d’acteurs autour de la mesure (scientifiques, artisans, entrepreneurs, paysans, chamans, percepteurs…), qui, loin d’en être les simples utilisateurs, influencent et souvent déterminent le choix des étalons métriques, leur manipulation et leur représentation.
Il nous est alors apparu que, tout en s’inspirant de méthodes propres à la métrologie historique, il était possible d’esquisser une véritable anthropologie des pratiques de mesures qui, outre sa dimension historique, offre la possibilité de mieux appréhender et traiter des questions contemporaines sur la quantification de phénomènes sociétaux, de comportements économiques ou de résultats scientifiques.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 21 janvier 2020.