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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Indexicalités langagières et sociales

  • Sandra Bornand, chargée de recherche au CNRS ( Hors EHESS )
  • Alice Degorce, chargée de recherche à l'IRD ( IMAF )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

  • Cécile Leguy, professeur à l'Université Sorbonne-Nouvelle (TH) ( Hors EHESS )

S'il s'agit de l'enseignement principal d'un enseignant, le nom de celui-ci est indiqué en gras.

Jeudi de 11 h à 13 h (CNRS, salle de conférences, 7 rue Guy-Môquet 94800 Villejuif), les 5 octobre, 9 novembre, 7 décembre 2017, 15 février, 15 mars et 5 avril 2018

Notion classique en linguistique, en particulier à travers l’étude de la déixis (depuis Bar-Hillel, 1954), l’indexicalité a été mise en valeur en anthropologie par les travaux des ethnométhodologues (Dodier, 2001) en tant que propriété du langage (ou pratiques signifiantes non verbales) pour marquer la référence au monde en contexte et pour faire sens. On peut, en suivant Michael Silverstein (2003), distinguer deux sortes d’indices : ceux qui sont dépendants du contexte (par exemple, les déictiques) et ceux qui créent le contexte, présupposant ou entraînant – pour employer les termes de Silverstein – des relations et/ou des situations sociales particulières. Nous nous intéresserons dans ce séminaire à la manière dont les rapports sociaux se manifestent dans l’indexicalisation à partir des usages du langage étudiés en situation et d’analyses ethnographiques fines des différents types de performances (littérature orale, cultures populaires, discours politiques ou religieux, rituels, langages musicaux et gestuels) et des modes de communication (direct ou médiatisé, par exemple l’usage des nouvelles technologies telles que les téléphones portables ou internet). Analysant les mécompréhensions d’un échange en contexte ethnographique, Fabian (2000 : 88) met par exemple en valeur comment l’interprétation peut parfois se heurter à un point d’achoppement qui révèle la globalité de la situation dans sa complexité. Nous interrogerons ainsi l’indexicalité en tant que révélatrice de rapports sociaux, qu’ils soient de domination ou égalitaires, conflictuels ou non, mais aussi à tout ce qui, dans les usages langagiers, peut être source d’incompréhension ou de mauvaise interprétation.

Programme à télécharger ici

5 octobre 2017 : Kristin Vold Lexander (Center for Multilingualism in Society across the Lifespan, Oslo) « Indexicalités à l'oral et à l'écrit : exemples sociolinguistiques »

9 novembre 2017 : Bertrand Masquelier (Lacito, Villejuif), « Indexicalités et contextualisations pragmatiques : les domaines (et objets) de recherche en anthropologie linguistique »

7 décembre 2017 : Maho Sebiane (Centre de recherche en ethnomusicologie UMR 7186 LESC, Centre français d’archéologie et de sciences sociales USR 3141 CNRS), « Pratique rituelle, discours et indexicalité : réflexions préliminaires au croisement de l’anthropologie musicale et de l’histoire en Arabie orientale »

15 février 2018 : Alain Sanou (Université Ouaga I Professeur Joseph Ki-Zerbo, Ouagadougou), « Indexicalités dans la littérature orale insurrectionnelle au Burkina Faso »

15 mars 2018 : Nathaniel Gernez (Laboratoire d'ethnologie et de sociologie comparative (Lesc) UMR-7186), « Travailler en famille dans une pépinière de la région d'Iringa en Tanzanie : usages du plurilinguisme et indexicalité des rapports d'autorité »

5 avril 2018 (de 9 h à 18 h) : Journée d'étude autour des travaux d'Elinor Ochs et d'Alessandro Duranto (UCLA), « Indexicalités et jeux de langage. Perspectives anthropologiques : sociale et linguistique ». Programme de la journée à télécharger

17 mai 2018 : Séance annulée Stavroula Katsiki (Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis), titre à venir

Intitulés généraux :

Centre : IMAF - Institut des mondes africains

Renseignements :

lieux : salle de conférence du CNRS à Villejuif (http://llacan.vjf.cnrs.fr/info_coord.php) et salle de visioconférence du centre IRD de Ouagadougou, Burkina Faso. Le séminaire est retransmis en visioconférence entre les deux sites.

Niveau requis :

Master.

Adresse(s) électronique(s) de contact : alice.degorce(at)ird.fr, cecile.leguy(at)gmail.com, s.bornand(at)bluewin.ch

Compte rendu

Cette année universitaire a été l’occasion d’organiser un nouveau séminaire en anthropologie linguistique co-porté par l’IMAF, le Llacan et le Lacito, en visioconférence entre Paris et Ouagadougou. Il s’agissait d’interroger la notion d’indexicalité, répandue en sciences du langage, du point de vue de l’anthropologie et, plus globalement, des sciences sociales. Concept classique en linguistique, en particulier à travers l’étude de la déixis (depuis Bar-Hillel, 1954), l’indexicalité a été mise en valeur en anthropologie par les travaux des ethnométhodologues (Dodier, 2001) en tant que propriété du langage (ou pratiques signifiantes non verbales) pour marquer la référence au monde en contexte et pour faire sens. On peut, en suivant Michael Silverstein (2003), distinguer deux sortes d’indices : ceux qui sont dépendants du contexte (par exemple, les déictiques) et ceux qui créent le contexte, présupposant ou entraînant – pour employer les termes de Silverstein – des relations et/ou des situations sociales particulières. Les différents conférenciers ont ainsi interrogé cette notion du point de vue des rapports sociaux et de différents corpus oraux, tout en se basant sur une ethnographie fine.
Deux séances ont tout d’abord permis d’interroger la notion d’indexicalité d’un point de vue théorique. Kristin Vold Lexander, du Center for Multilingualism in Society across the Lifespan (Oslo), a tout d’abord présenté la notion du point de vue de la sociolinguistique, tout en s’appuyant sur des exemples issus de ses travaux sur les téléphones portables au Sénégal. Dans la seconde séance, Bertrand Masquelier (Lacito) a pu développer les approches de l’indexicalité dans l’anthropologie linguistique nord-américaine, où la notion constitue un axe de recherche majeur, tandis qu’elle reste peu monopolisée dans les travaux francophones.
Les séances suivantes ont porté sur des études de cas, qui ont pu illustrer l’importance de l’indexicalité dans trois contextes socioculturels, trois types d’énoncés et selon trois approches méthodologiques différentes. Maho Sébiane, ethnomusicologue, a ainsi présenté les marques indexicales traversant deux corpus de chants recueillis en Arabie Saoudite. Alain Sanou, enseignant-chercheur en littérature orale à l’Université Ouaga I Pr Joseph Ki-Zerbo, a présenté un exposé en visio-conférence depuis Ouagadougou sur l’indexicalité dans la littérature orale contestataire à Bobo-Dioulasso au Burkina Faso dans l’insurrection d’octobre 2014 et les années qui l’ont précédée. Enfin, Nathaniel Gernez, anthropologue (post-doctorant bourse Fyssen, Leiden), a proposé l’analyse d’une interaction filmée dans une pépinière tanzanienne. Il a en particulier montré combien le recours à l’une ou l’autre langue peut indexer une position sociale, notamment dans les relations d’autorité.
Le 5 avril, la séance a été remplacée par une journée d’étude autour de la venue d’Alessandro Duranti (UCLA, Los Angeles, États-Unis) et Elinor Ochs (UCLA, Los Angeles, États-Unis), co-organisées avec le séminaire « Métaphore(s) » du Lacito. Ces deux anthropologues ont en effet beaucoup produit sur les indexicalités langagières et sociales. Dans sa communication, Alessandro Duranti a interrogé la relation entre indexicalité et intentionnalité, à partir de l’examen de « pépins » (glitches) dans la communication, des ratés significatifs de la manière dont les différents acteurs sociaux comprennent la langue utilisée mais qui sont aussi indicateurs de changement. Elinor Ochs, quant à elle, a montré à partir d’une ethnographie fine de l’éducation dans des familles samoanes et américaines, comment sont mobilisés des « marqueurs indexicaux d’intelligence » différents, mettant ainsi en évidence combien les interprétations indexicales ne sont pas des processus cognitifs neutres, mais idéologiques.
La dernière séance a consisté en un bilan de l’année. L’exploration de la notion d’indexicalités langagière et sociale entamée au cours de cette année, tant sur le plan théorique qu’à travers des études de cas, se poursuivra ainsi en 2018-2019, avec une collaboration appuyée de l’équipe basée au Burkina Faso.

Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 7 mai 2018.

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