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1er jeudi du mois de 17 h à 20 h (IISMM, salle des étudiants, 1er étage, 96 bd Raspail 75006 Paris), du 7 décembre 2017 au 7 juin 2018. Séance supplémentaire le 18 janvier 2018 (même heure, même salle)
Les études sur l’islam en rapport avec le capitalisme moderne relèvent fondamentalement de la sociologie wébérienne dans laquelle l’observation de l’islam sert d’instrument de comparaison pour confirmer la spécificité de la modernisation occidentale. Ainsi, une littérature importante des sciences sociales a considéré l’islam comme une contrainte à l’activité économique lucrative, lui attribuant une incapacité intrinsèque au développement des processus et des comportements de rationalisation qui définissent le champ économique moderne. Or, à partir des années 1970, la thèse de l’incompatibilité de l’islam avec le développement du capitalisme ainsi qu’avec les processus complexes qui définissent la modernité a été réinterrogée par une approche qui lui préfère une analyse multidimensionnelle, intégrant par-là l’étude des facteurs sociaux-historiques et contextuels.
En effet, le processus capitaliste génère de nouvelles interprétations et expériences de l’islam ainsi que de nouvelles représentations de celles-ci. En retour, le rapport à l’islam, dans ses pratiques individuelles et collectives, se voit investit par les catégories de pensées et de comportements de la modernité contemporaine, s’intégrant ainsi dans les marchés, les cadres de représentation et des processus de mobilisation et de politisation.
Sous quelles formes et dans quels cadres le rapport à l’islam est-il aujourd’hui mobilisé ? Quels sont les processus d’articulation du religieux et des dynamiques capitalistes ? Dans quelle mesure le référent islamique est créateur de « spécificités » dans les sociétés et marchés contemporains ?
Partant de ces questionnements, ce séminaire a pour trois objectifs : premièrement, explorer les processus d’identification, de représentation et de mobilisation des rapports à l’islam, deuxièmement faire surgir les différentes catégories d’acteurs étatiques et non-étatiques qui s’y impliquent, et enfin examiner les mutations économiques, politiques et sociales que ces processus engendrent dans les sociétés contemporaines. D’une approche transversale et au travers de divers cas d’étude ce séminaire cherche les modalités d’articulation du rapport au religieux avec les processus politiques et économiques les plans local, national et transnational.
7 décembre 2017 : Yana Pak (CETOBaC/EHESS), Aurélie Briard (chercheuse associée CETOBaC/EHESS), « Les réseaux d'entrepreneurs musulmans en Asie centrale post-soviétique »
18 janvier 2018 : Florence Bergeaud-Blackle, (chargée de recherche, CNRS), « L’invention du marché halal »
1er février 2018 : Frédéric Coste (docteur associé, CERI/Sciences Po), « L’absence d’islamité de la finance islamique lors de son institutionnalisation en Grande-Bretagne »
1er mars 2018 : Rano Turaeva (affiliated researcher, Max Planck Institute for Social Anthropology), « Halal Markets in Russia »
5 avril 2018 : Sarah A Tobin (senior researcher, University of Bergen), « Everyday Piety : Islam and Economy in Jordan »
3 mai 2018 :
7 juin 2018 : Filippo Osella (professor of anthropology, University of Sussex), « “A poor Muslim cannot be a good Muslim” : Islam, charitable giving, and market logic in Sri Lanka »
Mots-clés : Anthropologie culturelle, Anthropologie historique, Capitalisme, Cosmologie, Droit, normes et société, Économie politique, État et politiques publiques, Fait religieux, Histoire des idées, Histoire économique et sociale, Intellectuels, Islam, Marché, Philosophie politique,
Aires culturelles : Afrique, Arabe (monde), Asie, Europe, Musulmans (mondes), Turc (domaine),
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Intitulés généraux :
Centre : IISMM - Institut d'études de l'Islam et des sociétés du monde musulman
Adresse(s) électronique(s) de contact : frederic.coste(at)sciencespo.fr, dilek.yankaya(at)sciencespo.fr, yana.pak(at)gmail.com, florence.blackler(at)gmail.com
Ce séminaire est rattaché aux mentions « Études politiques » et « Sciences sociales des religions ». Il existe depuis 4 ans, affilié à l’IISMM.
Ce séminaire a abordé l’articulation entre économie et référent religieux islamique. Il a permis de mettre en lumière le développement d’une normativité islamique propre en pleine émergence. Celle-ci se retrouve dans la constitution de marchés visant à être conformes à la shariah dans de multiples domaines : banques et marchés de capitaux, certification halal (alimentation, tourisme, édition, habillement, etc.), jusqu’à se présenter comme une « discipline » de vente à travers un « marketing » dédié vu comme une forme normative acceptable (Sandikci).
Le domaine économique se voit investi d’une volonté de redéfinition du référent religieux. Dans une perspective historique longue, ce champ n’était pourtant pas privilégié par nombre de réformateurs ou traditionalistes par rapport aux dimensions politiques et morales.
Les approches ont montré qu’il s’agit d’une véritable « invention » comme dans le cas du halal, tandis que la question de la licéité de l’alimentation n’était pas interrogée pendant les générations précédentes (Bergeaud-Blackler). Cette tendance a pu être accentuée par l’émergence d’une classe moyenne comme dans le cas de la Jordanie (Tobin) ou d’une jeune élite poursuivant des études universitaires dans une formation continue en finance islamique (Kammarti). Des réseaux informels d’entrepreneurs musulmans en Asie centrale post-soviétique se réfèrent de manière croissante à l’islam, renforçant leur légitimité et leur interdépendance (Pak). Malgré l’ambition d’institutionnaliser une finance dite islamique au Royaume-Uni, il a pu être montré que « l’islamité » a été profondément normalisée dans ce processus (Coste). Certains groupes sociaux vont peser dans le domaine économique pour redéfinir le rapport au religieux, et pour imposer ainsi, dans une concurrence d’idées, une vision renouvelée de l’islam.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 23 février 2018.