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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Histoire et récits du travail. Questions d'écriture

  • Dinah Ribard, directrice d'études de l'EHESS ( CRH-GRIHL )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

S'il s'agit de l'enseignement principal d'un enseignant, le nom de celui-ci est indiqué en gras.

Mardi de 11 h à 13 h (salle 5, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 7 novembre 2017 au 13 février 2018

Ce séminaire porte sur la connaissance du travail, sur ses sources et sur la transmission du sens qu’avaient des actes de travail passés, entre époque moderne et début de l'époque contemporaine. La question de l’écriture est centrale dans une telle recherche : la présence de l'écriture dans l'expérience de travail ou à l'expérience de travail, ce que c'est que dire par écrit (question envisagée en parallèle dans le séminaire Linguistique et histoire animé avec Marion Carel), ce que c'est qu'un témoignage écrit sur une situation, un événement, une condition, un métier ; ce qui se pense par écrit, dans des libelles, des rapports, des comptes, des règlements, des suppliques, des recueils de documents, des traités, des sermons, des projets, des histoires, des poèmes ; ce qui se fait et ne se fait pas par écrit, et ce qui arrive aux écrits une fois qu’ils existent. Les différentes formes de l'érudition ouvrière, l'écriture artiste, l'histoire sociale des producteurs de sources sur le travail, l'outillage écrit de l'action et de l'organisation seront quelques-uns des objets examinés dans cette perspective en 2017-2018.

Aires culturelles : Europe, France,

Suivi et validation pour le master : Hebdomadaire semestriel (24 h = 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Histoire - Histoire et civilisations de l'Europe

Intitulés généraux :

  • Dinah Ribard- Histoire et récits du travail
  • Renseignements :

    par courriel.

    Direction de travaux d'étudiants :

    les mercredis, de 9 h 30 à 17 h.

    Réception :

    contacter l'enseignante par courriel.

    Site web : http://grihl.ehess.fr

    Adresse(s) électronique(s) de contact : ribard(at)ehess.fr

    Compte rendu

    Le séminaire s’est organisé, cette année, autour de deux manières d’approcher les sources concernant le travail. À partir de la discussion de plusieurs articles d’anthropologie du travail, une distinction entre regarder les sources comme des informateurs et les regarder comme des témoins a été proposée. Les regarder comme des témoins, c’est se demander ce qu’elles ont fait subsister à travers le temps de l’expérience passée à laquelle elles appartenaient : lorsqu’on prend en compte la présence d’écrits, de livres, dans le travail – livres techniques, écrits juridiques ou réglementaires, écrits poétiques –, on est amené à s’interroger sur ce qui a pu être fait à travers le temps avec ces écrits et ces livres. Plusieurs séances ont été à partir de ce point de départ consacrées à discuter l’approche pragmatiste des sources, qui les considère en tant qu’elles ont été des actions : or elles ont bien été des actions, mais des actions écrites, susceptibles d’être retravaillées, manipulées.
    Qu’est-ce que c’est qu’une décision écrite ? Que comprend-on de l’événement qu’a été une décision, en la regardant en tant qu’elle a été écrite ? Que devient une décision écrite ? qu’est-ce qui peut lui arriver ? dans quelle mesure ce qui lui peut lui arriver (être reproduite, bien connue, ou au contraire être oubliée au coin d’un document inutilisé) est-il pris en compte dans sa rédaction ? Par exemple, il peut arriver à une décision, éventuellement malgré ceux qui l’ont prise, de devenir une politique : écrite, elle peut être recopiée à côté d’autres décisions ; elle peut connaître la publicité de l’impression et de la réimpression, être remarquée et saisie par d’autres acteurs qui en font un élément de leurs propres politiques. Mais il se peut aussi que d’emblée, cette possibilité de reprise ait été pensée, incorporée à la décision elle-même. C’est ainsi qu’une lettre de cachet concernant l’organisation de la charité, émise en 1676 et envoyée de manière circulaire aux évêques de France, ouvrait d’emblée des voies qui ont en effet été empruntées. Cet ordre a été lu et commenté en chaire, il a aussi été imprimé à plusieurs reprises, et a été intégré à la réflexion de différents acteurs, certains proches du pouvoir et d’autres très marginaux (on est revenu à cette occasion sur les cas de Nicolas de Blégny et de Gabriel de Calloet Kerbrat), sur la prise en charge de la pauvreté dans le royaume. Une série de séances a été consacrée à cette décision et ses fortunes, tandis qu’une autre a pris pour terrain la réglementation minière d’Ancien Régime.
    On s’est aussi arrêté sur la question de l’intention. Une décision écrite, c’est l’écriture d’une intention : l’intention n’est donc pas extérieure à l’événement de la décision, elle n’en est pas la cause. Elle en est un élément, qui contribue à la constituer comme travail, comme effort orienté vers une réalisation, effort chargé de pensée, effort d’interprétation. Le travail sur les lettres de cachet, à partir des archives de la Maison du roi, a permis de réfléchir à cette question, à partir notamment d’une lettre du secrétaire d’État Pontchartrain à propos d’une grève d’ouvriers rubaniers : le ministre a écrit les intentions de cette grève, qu’il a ainsi fait enregistrer comme acte politique digne d’une attention politique.

    Publications

    • « Ce que fait la littérature. Poésie et histoire des mondes ouvriers », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 138, 2018, p. 159-173.
    • « La première personne du singulier », dans Michel de Certeau et la littérature, sous la dir. de J.-C. Abramovici et C. Jouhaud, Les Dossiers du Grihl, 2018-02, https://journals.openedition.org/dossiersgrihl/6894
    • Avec P. Büttgen, « La Grèce silencieuse de Raymond Queneau » dans Le double voyage, sous la dir. de L. Arnoux-Farnoux et P. Kosmadaki avec la collaboration de S. Jollivet, Paris-Athènes (1919-1939), Athènes, École française d’Athènes, 2018, p. 327-338.
    • Avec H. Fernandez, « Le “Quinte-Curce de Vaugelas” » dans Postérités européennes de Quinte-Curce : De l’humanisme aux Lumières (XIVe-XVIIIe siècle), sous la dir. de C. Gaullier-Bougassas, Turnhout, Brepols, 2018, p. 343-360.

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 13 novembre 2017.

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