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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

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  • Les hommes au miroir des choses : objets techniques et identités dans la mondialisation. Arts et sciences sociales en dialogue

Les hommes au miroir des choses : objets techniques et identités dans la mondialisation. Arts et sciences sociales en dialogue

  • Giulia Battaglia, docteure en anthropologie et arts visuels ( IIAC-LAIOS )
  • Jean-Bernard Ouédraogo, directeur d'études de l'EHESS, directeur de recherche au CNRS (TH) ( IIAC-LAIOS )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

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2e mercredi du mois de 9 h à 11 h (salle AS1_24, 54 bd Raspail 75006 Paris), du 13 décembre 2017 au 13 juin 2018. La séance du 9 mai est reportée au 16 mai (salle BS1_05, 54 bd Raspail)

L’attention portée aujourd’hui à la mondialisation éclaire une expansion planétaire inédite des échanges d’objets techniques, objets à finalité utilitaire. Des ustensiles de cuisine aux armes, les téléphones mobiles, les voitures et les lunettes sont ces « choses » qui, à la faveur de la multiplication des échanges, se répandent à travers le monde. Or, si les études s’intéressent à cette dynamique, elles privilégient presque exclusivement l’intensification des transactions économiques sans voir, dans le sillage de cette mobilité des objets techniques, l’expression potentielle d’une confrontation et d’un dépassement des cadres symboliques, de la technicité et de la politique au double niveau individuel et collectif. L’usage ordinaire des objets techniques est loin de la banalité qu’on lui prête volontiers. Ces objets techniques sont pris dans le tourbillon silencieux de la compétition des valeurs sociales induite par les connexions globales. La relation d’usage que portent ces objets recèle une complexité historique et sociale qui la dépasse. En effet, dans cette circulation prosaïque des objets, on trouve un déplacement de signes, de marqueurs sociaux, des condensations de pouvoir et une reformulation généralisée de l’architecture des représentations et des pratiques sociales à toutes les étapes du processus d’englobement. À l’occasion de l’usage des objets techniques, s’actualise en effet un rapport au monde, contradictoire à l’aune des différences qui caractérisent les sociétés humaines.

Le séminaire examinera les enjeux théoriques et empiriques de ces rencontres dans le but de mieux comprendre les nouvelles conventions sociales qui s’établissent à cette occasion, et ceci, bien au-delà l’immédiate expression des individus et des objets techniques. Parce que ces objets techniques, concrétisent de la capacité sociale, ils extériorisent des modèles culturels et des pratiques sociales réglées et leurs intentions affirmées comme leurs matérialités sont souvent localement reformulées, détournées et appropriées par des logiques contraires.

Le séminaire suivra deux perspectives complémentaires : a) une première approche multidisciplinaire classique en sciences sociales, b) une perspective artistique (incluant toutes les expressions artistiques) qui interprète le monde à partir des deux berges de la faille mobile et sinueuse qui traverse le monde globalisé. Ce séminaire est une activité du programme L’invention des formes de représentation à l’ère de la mondialisation soutenu par la Fondation Nina et Daniel Carasso, et, à ce titre, accordera une importance particulière à la mise en dialogue des artistes avec les sciences sociales.

13 décembre 2017 :

  • Jean-Bernard Ouédraogo & Giulia Battaglia, « Les relais techniques de l’expansion globale : une introduction »
  • Giulia Battaglia (anthropologue, IIAC-LAIOS), « Le cinéma documentaire Indien et ses festivals dans la mondialisation »

10 janvier 2018 : Gabrielle Chomentowski, « Circulation transnationale du matériel et des pratiques cinématographiques dans les années 1960 et 1970 : (URSS - Afrique - Moyen-Orient) »

À partir de la fin des années 1950, l'Union soviétique signe avec différents pays d'Afrique puis du Moyen-Orient des accords de coopération dans différents domaines culturels et en particulier dans le domaine cinématographique. Dans ce cadre, l'Union soviétique s'engage à aider matériellement ces pays en leur envoyant des caméras, des appareils de projection et des films et propose aussi une aide dans la formation aux métiers du cinéma. Nous montrerons comment différents objets permettent de reconstituer cette histoire largement oubliée.
Gabrielle Chomentowski travaille sur l'histoire politique et culturelle européenne et africaine à travers l'objet cinématographique. Elle a publié différents articles sur la question des nationalités dans le cinéma soviétique des années vingt et trente, ainsi que le livre Filmer l'Orient, politique des nationalités et cinéma en URSS (1917-1938), Ed Petra, 2016. Elle travaille actuellement sur les circulations dans le domaine cinématographique entre l'Union soviétique, l'Afrique et le Moyen-Orient à partir des années 1950. En plus de ces activités de recherche, elle enseigne à l'université Paris 2-Assas, à l'université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines et est post-doctorante pour le programme Sociétés plurielles, INALCO, USPC.

14 février 2018 :

  • Intervention de : Marie Phliponeau "Danse - Danses Hip Hop - Danses Urbaines Globalisées"
  • Discutantes : Emmanuelle Olivier, Centre Georg Simmel/Ehess, Roberta Shapiro, IIAC/Ehess

La matière de la culture hip hop est protéiforme, mutante et universelle. Le processus cumulatif et circulaire, propre à la danse hip hop, qui n'a jamais cessé de mettre en relation Afrique, Caraïbes, États-Unis, Europe depuis plusieurs siècles s'est accéléré et a atteint une échelle mondiale avec l’avènement d'Internet. Aujourd'hui la danse hip hop qui circule au quotidien est partagée par une planète d'anonymes et se trouve englobée dans une dénomination plus large de « danses urbaines » - qui émergent aux quatre coins du globe avec chacune leur spécificités. L'enjeu n'est pas seulement sémantique. La danse « populaire » et « urbaine » s'en trouve elle-même profondément bouleversée - créations et circulations des mouvements, dispositifs de danse, rapport aux autres danseurs et aux « publics », danses éphémères, horizons créatifs, frontières entre danses « populaires » et écritures chorégraphiques,...

Marie Phliponeau est chorégraphe de la compagnie To Mix or Not. Formée en danse hip hop par les premières générations de danseurs qui ont posé les bases de la danse hip hop, elle créée en 2009 sa compagnie

14 mars 2018 : Intervention de Yann Philippe Tastevin, « Les tribulations d'un rickshaw indien en Égypte »

Moyen de transport populaire depuis une cinquante d’année dans les villes pauvres d’Asie, le rickshaw à moteur, à l’initiative de son principal constructeur, Bajaj Auto, part, au tournant du vingt-et-unième siècle à la conquête du monde. De la fondation à la stabilisation de la filière, je propose d’explorer au ras du trois-roues, la mise en route africaine de l'innovation indienne, pour comprendre entre Kinshasa (RDC), le Caire et les petites villes du delta du Nil (Égypte), la dynamique imprévisible des circulations technologiques et les processus par lesquels ces mêmes technologies sont réinventées. Il s'agira d'analyser à travers le cas rickshaw la dynamique de ces technologies de transport (rickshaw, tacots, camions) hors de l’espace et du temps où celles-ci ont été produites. Ces technologies réinventées dans des ateliers polyvalents, assemblées sur des chaînes de montage à ciel ouvert, entretenues au coin de la rue par des artisans, des ingénieurs, des mécaniciens circulent dans le monde entier à l’initiative d’entrepreneurs transnationaux. Tout l’enjeu d’une démarche résolument ethnographique est alors de combiner une anthropologie des techniques et une anthropologie économique des dynamiques commerciales transnationales qui sous-tendent les logiques d’usage de ces technologies.

Yann Philippe Tastevin est anthropologue au CNRS (LISST - UMR 5193 à Toulouse). Ses travaux portent sur les processus d’innovation au Sud et les circulations globalisées des technologies.  Il est l’auteur Autorickshaw : émergence et recomposition d’une filière entre l’Inde, l’Égypte et le Congo, à paraître aux éditions Karthala, collection « Terre et gens d’Islam » (à paraitre)

11 avril 2018 : Denis Monnerie, « Les circulations des objets dans les cérémonies kanak (Kanaky Nouvelle-Calédonie, Océanie) »

Au nord de la Kanaky Nouvelle-Calédonie, des cérémonies qui sont parties prenantes de la sociabilité du monde kanak élaborent et valident des relations entre humains et avec le monde. Celles-ci peuvent être analysées et modélisées au plus près des conceptions locales en termes de procédures opératoires. Un modèle anthropologique comparatiste qui prend sa place dans un espace civilisationnel incluant l'Océanie et l'Indonésie. Cette approche dynamique des cérémonies kanak montre le rôle central des objets cérémoniels dans des transferts et circulations de prestations composites (verbales et non verbales). Je proposerai une approche (i) du remplacement d’anciens objets cérémoniels kanak par des objets marchandises contemporains, (ii) de leurs dimensions visuelles, tactiles, significatives et intellectuelles, (iii) de leur place dans l’élaboration et la validation cérémonielle des relations.

Denis Monnerie est professeur d'ethnologie à l’Institut d’ethnologie de Université de Strasbourg et membre du laboratoire DynamiquE (UMR 7367 CNRS). Il a effectué des recherches en anthropologie historique sur Mono-Alu et le nord-ouest des Îles Salomon et des enquêtes de terrain en Asie et en Océanie. Depuis 1992 il travaille à Arama et au nord de la région Hoot ma Whaap, en Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il travaille plus particulièrement sur les imbrications des relations internes et externes des sociétés, les théories des échanges et des rituels, les modes sociaux de significations, les organisations sociales et l'épistémologie. Parmi ses publications, Nitu, les vivants, les morts et le cosmos selon la société de Mono-Alu (Îles Salomon) (Leyde, Center for Non Western Studies, 1996; en ligne sur ODSAS) et La parole de notre Maison. Discours et cérémonies kanak aujourd’hui (Paris, CNRS Éditions et Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2005). Sur les objets, « Objets cérémoniels, chaînes opératoires et élaboration des relations sociales (Arama et Hoot ma Whaap, Kanaky Nouvelle-Calédonie, Mélanésie) » in M. Bailly, P. Lemonnier et S. Revolon (eds.) Objets irremplaçables, Thema de Techniques et Cultures n° 58, 2012, pp 122-141.

www.cairn.info/load_pdf.php?download=1&ID_ARTICLE=TC_058

13 juin : Séance exceptionnelle avec :

  • Anne Bationo (chercheure en ergonomie, Université de Paris 8),
  • Samuel Bianchini (artistechercheur, EnsadLab),
  • Cozzolino Francesca (enseignante-chercheure EnsadLab) 

En quête de temps. Formes et représentations d’expériences objectives et subjectives du temps

L’objectif de cette communication est de restituer une recherche qui se situe à l’intersection du monde de l’art et des sciences humaines et sociales puisqu’il s’agit d’une enquête ethnographique réalisée autour d’un dispositif artistique interactif qui interroge le rapport sensible au temps des usagers d’une gare. Issu d’une association entre le Forum Vies Mobiles et le programme de recherche Reflective Interaction d’EnsadLab, Texel (contraction de temps et de pixel), est composée de sabliers interactifs qui réagissent aux mouvements des voyageurs : quand le voyageur se rapproche, recule, bouge, le module pivote sur son axe médian, altérant l’écoulement du sable qui s’accélère, ralentit ou s’arrête. Du fait de sa dimension interactive, le sens de l’œuvre ne peut être appréhendé par les voyageurs que s’ils dévient de leur trajectoire et consacrent du temps à engager une relation avec elle.

L’œuvre a été expérimentée dans la gare d’Ermont-Eaubonne pendant un mois, du 16 novembre au 16 décembre 2015. Durant l’exposition de Texel en gare, nous avons mené une enquête pour comprendre si et comment cette oeuvre permet de se réapproprier le rythme de son existence et son propre rapport au temps lors d’une déplacement et de rompre avec l’accélération (Rosa, 2013) du temps moderne.

Pour mener cette étude, nous avons mis en place une enquête ethnographique et une enquête quantitative. Cette dernière a donné lieu à la création d’un logiciel de représentation des trajectoires des voyageurs en gare. Outil de visualisation de trajets pressés, mais parfois ralentis par l’interaction avec l’œuvre, ce logiciel a permis aux chercheurs en sciences sociales de compléter les données recueillies par les observations de l’expérimentation en gare.

Nous décrirons les principaux résultats de cette enquête en mobilisant les concepts d’aire intermédiaire d’expérience (Winnicott, 1975). Nous pensons que l’aire intermédiaire d’expérience surgit chez l’homme pour prendre le relais là où les schèmes familiers échouent, pour « inventer », créer un rapport possible à une situation inconnue, imprévue. Or l’œuvre Texel installée en gare constitue une situation résolument dissonante puisque pour entrer en contact avec cette oeuvre, les passagers n’ont pas d’autre choix que de ralentir et prendre le temps de la découverte, ce qui nécessite une mise en suspens de leurs habitudes, de leurs schèmes de déplacements en gare.

Nous examinerons ensuite la manière dont les passagers de la gare qualifient Texel en mobilisant le concept d’éstrangement de Cholovski (1917) pour rendre compte des phénomènes de défamiliarisation du temps objectif. Texel fonctionne alors comme un élément de surprise, un embrayeur de perceptions inédites. S’ouvrent ainsi des espaces de confrontation de soi face à l’écoulement du temps que symbolise le sablier, qui prennent la forme de récits de vie, d’énonciations biographiques, de dénonciations de situations de travail stressantes, d’échanges inédits avec les chercheuses. Ces expériences se situent dans un monde flottant, où l’on oublie que l’on a un train à prendre, que l’on est pressé, que « le temps file ».

Pour tout renseignement : inventformes@gmail.com

Programme « L’invention des formes de représentation à l’ère de la mondialisation ». Avec le soutien de la fondation Daniel et Nina Carasso

Mots-clés : Arts, Globalisation,

Domaine de l'affiche : Sociologie

Intitulés généraux :

  • Jean-Bernard Ouédraogo- Sociologie de l’Afrique contemporaine : savoirs, violences et arts
  • Renseignements :

    Jean-Bernard Ouedraogo par courriel.

    Adresse(s) électronique(s) de contact : jean-bernard.ouedraogo(at)ehess.fr

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 6 juin 2018.

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