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1er et 3e jeudis du mois de 9 h à 11 h (salle 3, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 2 novembre 2017 au 17 mai 2018. A partir du 18 janvier 2018, les séances se dérouleront en salle 8 (même horaire, même adresse). La séance du 1er mars est annulée et reportée au 29 mars (même horaire, même salle)
Qu’on en fasse l’apologie ou la critique, les marchandises sont au centre de la société. Malgré un champ de recherche en plein essor, elles ne font pourtant pas encore l'objet de recherches systématiques en sciences sociales. En confrontant plusieurs approches théoriques – économie libérale, anthropologie des objets, économie politique marxiste – ce séminaire cherche à construire une théorie sociologique des marchandises pour comprendre leurs effets sur les rapports sociaux.
L’objectif du séminaire est de croiser un ensemble de textes classiques (Smith, Marx, Hayek, Aristote) et plus contemporains (Appadurai, Latour, Burawoy) avec des résultats d’enquêtes empiriques. Parmi les nombreux exemples abordés, trois études de cas nous serviront de fil rouge : l’industrie pharmaceutique et sa remise en cause ; les crédits à risque et les luttes actuelles contre les dettes ; l’esclavage et sa contestation, dont les stigmates sont encore sensibles aujourd'hui.
Contrairement à une représentation figée de la valeur marchande, nous verrons qu’une marchandise est un processus contradictoire, fondé sur l’opposition entre échange et usage, qui reproduit ou modifie les rapports sociaux – qu’ils soient de classe, de genre ou racialisés. En construisant une approche historique et politique de la valeur, fondée sur des données concrètes (documents, observations, entretiens, films) et une bibliographie récente, on revisitera les processus de financiarisation, de médicalisation et de marchandisation de la force de travail, ainsi que leur contestation.
Ce séminaire est accessible sur la plateforme d'enseignement de l'Environnement numérique de travail de l'EHESS :
Programme des séances à télécharger ici
Mots-clés : Anthropologie culturelle, Classes sociales, Culture matérielle, Économie politique, Esclavage, Ethnographie, Finance, Histoire économique et sociale, Médecine, Mouvements sociaux, Racismes et races, Sociohistoire,
Aires culturelles : Afrique, Amérique du Nord, Europe,
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Sociologie
Intitulés généraux :
Renseignements :
pour tout renseignement concernant le séminaire contacter l'enseignant par courriel.
Réception :
pour tout renseignement concernant le séminaire contacter l'enseignant par courriel.
Niveau requis :
pas de niveau requis, mais des connaissances de base en sociologie et économie politique sont fortement conseillées.
Adresse(s) électronique(s) de contact : quentinravelli(at)hotmail.com
En partant de trois grandes approches de la marchandise – économie libérale, marxisme, anthropologie culturelle – ce séminaire a présenté les principaux enjeux théoriques du cours. Loin d’imposer des clivages disciplinaires, ce premier cycle de lectures a au contraire dessiné des croisements possibles, malgré les divisions idéologiques marquées. L’approche anthropologique de la « biographie sociale des marchandises », qui s’ancre dans une définition de la valeur comme forme d’échange, s’est par exemple ouverte à des approches plus économiques, qui intègrent la division du travail productif, comme celle de Maurice Godelier, ou encore plus sociologique, comme l’école dite de la traduction, de Bruno Latour, confrontée à la sociologie du travail. Des réflexions de fond, comme celles qui concernent l’origine de la valeur marchande, ont pu être combinées à des questionnements plus sectoriels, et à des formes inhabituelles de marchandisation.
L’objectif du séminaire étant de traduire un questionnement d’économie politique en pistes de recherches concrètes, nous avons ensuite développé plusieurs études de cas permettant aux étudiants de lier leur travail de lecture à celui de l’enquête empirique, par observations, statistiques ou analyses de documents. Deux cas actuels – les produits pharmaceutiques et les produits financiers – et un cas historique – l’esclavagisme – ont suscité des débats importants, liés à la diversité des disciplines pratiquées par les étudiants. Économie, sociologie, histoire, anthropologie et sciences politiques ont fait surgir des questionnements transversaux, ainsi que des malentendus intéressants à décrypter. Lors des discussions autour des textes, les objets de recherches étaient souvent mobilisés. Ils ont conduit, pour la validation du séminaire, à des réflexions de qualité, par exemple sur la relation marchandise-prix comme forme de sacrifice, le « Credit Linked Note » comme marchandise immatérielle, ou encore le paradoxal « usage anticapitaliste des marchandises ».
Nous avons enfin accueilli trois chercheurs venus présenter leurs travaux. André Orléan, depuis l’économie et à la demande des étudiants, nous a proposé une réflexion stimulante sur l’origine et la nature de la valeur marchande. Philippe Steiner, en sociologie économique, nous a exposé ses recherches sur les marchandises qui se situent sur des frontières morales contestables, comme les organes humains ou encore les produits liés aux jeux d’argent. Anselm Jappe, à partir d’une approche philosophique, a détaillé l’architecture conceptuelle du fétichisme de la marchandise chez Marx, et ses principaux enjeux. Les dernières séances ont permis de conclure le séminaire à partir d’une réflexion sur les croisements méthodologiques possibles, et ouvert une discussion autour du mouvement étudiant surgi au mois d’avril : deux cours ont été banalisés pour échanger au sujet des réformes de l’enseignement supérieur et de la SNCF.
Ce programme de lectures et de recherches cherchant à combiner l’économie politique et la sociologie sera prolongé l’année suivante (2018-2019) sous une forme nouvelle. L’analyse des crises économiques et de leurs conséquences sociopolitiques sera l’occasion de réfléchir aux grands moments de ruptures des formes habituelles de la reproduction sociale.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 4 avril 2018.