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Mardi de 9 h à 13 h (IISMM, salle de réunion, 1er étage, 96 bd Raspail 75006 Paris), les 14 novembre 2017, 23 janvier, 20 février, 20 mars, 10 avril et 15 mai 2018
Une équipe formée de spécialistes de différentes Églises et aires culturelles (Ruthènes, Russes, Grecs, Roumains, Arméniens, Arabes melkites et maronites, Assyro-chaldéens, Éthiopiens …) se réunit depuis plusieurs années au CéSoR pour confronter thématiques, méthodes et résultats de recherche portant sur des mutations et des processus comparables, des Réformes à la première guerre mondiale. Ce séminaire, ayant reçu le soutien du campus Condorcet en 2016-2017, poursuivra ce travail de connexion des historiographies et mettra en dialogue les recherches en cours.
Les mutations intervenues dans ces aires culturelles à partir des Réformes protestante et catholique, dans la pratique rituelle et liturgique, dans la formation du clergé et la disciplination des fidèles, dans la production de définitions dogmatiques, ont contribué à préciser et à faire évoluer les identités respectives dans un climat de compétition et d’émulation des différentes confessions présentes sur le même terrain, mais selon des processus comparables : introduction du livre imprimé, choix et pédagogie linguistiques, développement d’une science administrative, références à l’érudition occidentale, rôle des personnalités « entre-deux » circulant entre différentes aires culturelles et confessionnelles… En s’attachant à étudier et à comparer ces processus, les participants du séminaire réussissent à établir des connections, parfois à en mettre au jour des inattendues, entre personnalités, institutions et lieux appartenant à des aires culturelles différentes.
Mardi 14 novembre 2017 :
Mardi 23 janvier 2018 :
Mardi 20 février 2018 :
Mardi 15 mai 2018 :
Mots-clés : Ecclésiologie, Empire, Fait religieux, Histoire, Histoire culturelle, Interactions, Liturgie, Minorités, Orientalisme, Religieux (sciences sociales du),
Aires culturelles : Arabe (monde), Europe sud-orientale, Méditerranéens (mondes),
Suivi et validation pour le master : Mensuel annuel/bimensuel semestriel (8x3 h = 24 h = 6 ECTS)
Intitulés généraux :
Centre : CéSor - Centre d'études en sciences sociales du religieux
Renseignements :
contacter les enseignants au CéSoR, tél. : 01 53 10 54 49 ou par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
fixation des modalités par un entretien individuel sur rendez-vous.
Réception :
au CéSoR, EHESS, 10, rue Monsieur le Prince, 75006 Paris, sur rendez-vous.
Niveau requis :
évaluation préalable par entretien avec les enseignants.
Adresse(s) électronique(s) de contact : bernard.heyberger(at)ehess.fr, aurelien.girard(at)univ-reims.fr
Le séminaire de cette année a porté essentiellement sur la notion de « confessionnalisation » dans le monde orthodoxe. Cette notion, élaborée dans le contexte académique allemand des années 1980, entrée dans l’historiographie française dans les années 1990, est aujourd’hui en débat parmi les spécialistes du christianisme oriental à l’époque moderne. Comme Vasilios Makrides (Université d’Erfurt) l’a rappelé, le catholicisme et l’orthodoxie ne se reconnaissent pas comme confession, mais comme Église universelle. Ce n’est que face aux protestants que les catholiques allemands se sont définis comme « confession ». De même, les orthodoxes sont devenus confession de facto lorsqu’ils se sont trouvés à partager un territoire avec les catholiques et/ou les protestants. La profession de foi, qui permet de définir clairement les limites dogmatiques et disciplinaires dans lesquelles le clergé, mais aussi les fidèles de chaque confession sont censés s’inscrire, est d’abord un document protestant, adopté ensuite par les catholiques, puis par les orthodoxes.
On a reproché au paradigme allemand de la confessionnalisation d’aborder la question par le haut, par la construction des Églises et des États, et d’accorder trop d’importance au rôle de l’État. De fait, il est possible d’écrire une histoire de la confessionnalisation par le bas. Angela Falcetta (Université de Padoue) s’est intéressée aux communautés « grecques » d’Italie du Sud. Des groupes de « Grecs » d’origine différente, et arrivés à des périodes différentes, ont constitué des communautés autour d’églises paroissiales, selon des conditions réglementaires et sociales particulières à chaque lieu, mais sur le principe de constituer un corps avec des privilèges propres. À partir du Concile de Trente ces italo-greci ont été visés par des activités missionnaires pour les faire entrer dans le catholicisme tridentin. Mais à partir du XVIIIe siècle, la politique des Bourbons de Naples envers la Russie, un déclin de l’activité missionnaire catholique, et la montée de l’influence russe, ont au contraire amené les « Grecs » de la diaspora à s’affirmer orthodoxes. Les compromis auparavant passés avec les catholiques furent remis en cause. David Do Paço (Sciences Po, Paris), évoquant les « Grecs » dans l’empire autrichien (à Vienne et à Trieste) a montré comment des logiques locales d’implantation se combinaient à des politiques d’État pour aboutir à la constitution de communautés « grecques ». Néanmoins, la différence entre « Illyriens » (orthodoxes de Hongrie, rattachés au patriarcat serbe non reconnu par le patriarcat œcuménique) et les orthodoxes sujets ottomans (qui bénéficièrent de privilèges particuliers dans les traités des Habsbourg avec la Porte) constituaient des entités à peu près inconciliables. D’autre part, une forme de clientélisme propre à l’aristocratie autrichienne rattachait les orthodoxes sujets ottomans installés à Vienne à des « protecteurs » spécialisés dans les relations commerciales et diplomatiques avec Constantinople.
À l’intérieur de l’orthodoxie, des particularismes s’ethnicisaient progressivement. Ce sont en particulier les rapports entre la Russie et l’hellénisme qui furent interrogés à partir du XVIe siècle, aboutissant à l’autocéphalie de Moscou, puis sa reconnaissance comme patriarcat, tandis que des réformes ecclésiastiques homogénéisaient l’Église russe et sa liturgie. Une orthodoxie russe spécifique émergeait ainsi, qui, à partir du XVIIIe siècle, oscillait entre affirmation nationale et prétention universaliste au sein de l’orthodoxie. L’annexion d’importantes communautés catholiques à l’empire mena au retour significatif d’uniates à l’orthodoxie. Les échanges intellectuels entre Grecs et Russes, dans les deux sens, ne cessèrent pas, préparant néanmoins l’avènement des différents nationalismes du XIXe siècle (V. Makridès).
La question du rapport de la confession au territoire s’est posée et se pose encore spécialement en Ukraine. Vera Tchentsova (Maison française d’Oxford) a rappelé les conditions particulières du rattachement des orthodoxes de la métropole de Kiev à Moscou en 1667. A. Brüning (Radboud University Nijmegen) a évoqué le cas des catholiques ukrainiens, amenés à partir de 1695 à manifester leur loyauté envers le Tsar tout en affirmant leur catholicisme. Un climat de compétition entre les deux confessions conduisit à la construction d’identités plus claires à travers le recours à des instruments semblables. Les orthodoxes, recourant aux mêmes méthodes et aux mêmes outils que les catholiques, érigèrent néanmoins un ensemble dogmatique, liturgique et ecclésial propre, nettement distinct du catholicisme. Face à la définition catholique du Purgatoire, de la peine proportionnelle à la gravité du péché, et l’affirmation du jugement individuel au moment de la mort, les orthodoxes affirmèrent au contraire leur attachement au Jugement Dernier et leur rejet du Purgatoire. Ils n’en partageaient pas moins avec les catholiques une certaine idée du Salut, et ils reprirent du catholicisme tridentin des éléments comme la confession ou la liste de péchés. Les représentations du Jugement dernier et du Purgatoire sur le territoire ukrainien montrent cette porosité entre les deux confessions (Liliya Berezhnaya, Université de Münster).
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 20 mars 2018.